L'ancien homme fort de la droite israélienne Ariel Sharon s'est éteint samedi après huit ans de coma, entraînant une vague d'hommages côté israélien, tandis que les Palestiniens fustigeaient un «criminel de guerre».

«Il n'est plus. Il est parti quand il l'a décidé», a déclaré le fils du défunt, Gilad, aux journalistes à l'hôpital Sheba à Tel Hashomer, près de Tel-Aviv.

Selon le professeur Shlomo Noy, Ariel Sharon, élu chef du gouvernement en 2001 et réélu en 2003, est «mort paisiblement» en début d'après-midi d'une défaillance cardiaque à 85 ans, entouré par sa famille.

Dans un bref communiqué, le président américain Barack Obama a présenté ses condoléances aux Israéliens et à la famille de l'ex-premier ministre, qu'il a décrit comme «un leader qui a consacré sa vie à l'État d'Israël».

C'est le vice-président Joe Biden qui représentera les États-Unis lors des obsèques.

L'état de santé de l'ancien général, plongé dans le coma depuis une attaque cérébrale le 4 janvier 2006, s'était détérioré depuis le 1er janvier.

Les funérailles avec les honneurs militaires auront lieu lundi à 14 h (7 h à Montréal) dans le ranch familial des Sycomores, dans le sud d'Israël, non loin de la frontière avec Gaza, où Sharon a souhaité être inhumé aux côtés de sa deuxième épouse Lily, selon un communiqué du bureau du premier ministre.

Auparavant, le cercueil d'«Arik» (diminutif d'Ariel) sera exposé pour le public toute la journée de dimanche à la Knesset, le Parlement israélien, où une cérémonie d'hommage officielle est prévue lundi à partir de 9 h 30 (7 h 30 GMT), a précisé le communiqué.

Sa mémoire vivra «à jamais dans le coeur de la nation», a affirmé le premier ministre Benjamin Netanyahu, en exprimant son «profond chagrin».

«Il a été d'abord et surtout un guerrier courageux et un grand chef militaire, un des plus grands des forces armées israéliennes», a-t-il souligné.

«Et quand il a quitté l'armée, il a continué à oeuvrer pour Israël, jouant un rôle dans de nombreux gouvernements israéliens et bien sûr en tant que onzième premier ministre d'Israël», a-t-il ajouté.

Le président Shimon Peres, dernier représentant de cette génération des fondateurs d'Israël, a salué son «cher ami, Arik», «un soldat courageux et un dirigeant audacieux qui aimait sa nation et que sa nation aimait».

Le ministre de la Défense Moshé Yaalon, opposé au retrait de la bande de Gaza ordonné par Sharon en 2005, a rendu hommage «malgré les différences d'opinions» à «l'expérience et aux qualités de dirigeant» de l'ancien général.

Invasion du Liban et retrait de Gaza

Ariel Sharon restera dans l'Histoire comme l'artisan en 1982 de la désastreuse invasion du Liban alors qu'il était ministre de la Défense, mais aussi comme le chef de gouvernement qui aura évacué les troupes et les 8000 colons de la bande de Gaza en 2005.

«Sharon était un criminel, responsable de l'assassinat d'Arafat et nous espérions qu'il comparaisse devant la Cour pénale internationale (CPI) en tant que criminel de guerre», a affirmé à l'AFP Jibril Rajoub, un haut responsable du Fatah, le mouvement du dirigeant historique palestinien.

Jusqu'à la mort en novembre 2004 de Yasser Arafat, qu'il avait fait assiéger à partir de décembre 2001, Sharon avait multiplié les menaces à l'encontre du dirigeant palestinien, ce qui a alimenté les soupçons d'un empoisonnement, qu'Israël a toujours nié.

«Notre peuple vit un moment historique avec la disparition de ce criminel aux mains couvertes du sang des Palestiniens et de leurs dirigeants», a déclaré un porte-parole du Hamas, au pouvoir à Gaza, Sami Abou Zouhri. Le fondateur de ce mouvement, cheikh Ahmad Yassine, avait été assassiné en 2004 par l'armée israélienne sur ordre de Sharon.

Human Rights Watch (HRW) a également jugé «regrettable que Sharon aille vers sa tombe sans répondre devant la justice de son rôle à Sabra et Chatila et d'autres violations» des droits de l'Homme.

Une commission d'enquête israélienne avait conclu à la «responsabilité indirecte» mais personnelle de Sharon dans le massacre de centaines de civils palestiniens par ses alliés phalangistes chrétiens libanais dans ces camps de réfugiés palestiniens à Beyrouth en septembre 1982.

À l'annonce de sa mort, une immense joie s'est emparée du camp de Chatila, dans un quartier déshérité du sud de Beyrouth. Là aussi, les Palestiniens auraient souhaité qu'il soit traduit devant les tribunaux mais beaucoup s'en remettaient à la justice de Dieu.