Le rapport français écartant la thèse d'un empoisonnement de Yasser Arafat, décédé en 2004 près de Paris, est très difficile à comprendre, a estimé jeudi le professeur François Bochud, co-auteur d'une expertise suisse qui avait abouti à une conclusion inverse.

«Nos données conduisent davantage vers la thèse d'un empoisonnement que dans la direction opposée», a déclaré à l'AFP le professeur Bochud, directeur de l'Institut de radiophysique de Lausanne.

M. Bochum est le co-auteur d'un rapport publié le 7 novembre privilégiant la thèse d'un empoisonnement au polonium. Les scientifiques suisses, qui ont remis leur rapport à Souha Arafat, la veuve d'Arafat, et à l'Autorité palestinienne, ont indiqué avoir mesuré des doses de polonium jusqu'à 20 fois supérieures aux taux habituels, sans toutefois affirmer catégoriquement que cette substance radioactive était à l'origine du décès.

En revanche, des experts français mandatés par la justice française ont écarté la thèse d'un empoisonnement, privilégiant celle d'une mort naturelle du dirigeant palestinien, selon une source proche de l'enquête. Selon leur rapport qui n'a pas encore été publié, c'est le radon, un gaz radioactif naturellement présent dans l'environnement qui explique les taux élevés de polonium découverts dans les échantillons.

M. Bochud, qui a lu le rapport français, a souligné que le rapport suisse avait déjà exposé de nombreux arguments allant à l'encontre de cette théorie. Et notamment le fait que les autres restes exhumés dans le même cimetière ne contenaient pas de doses anormales de polonium.

Les experts suisses comme leurs collègues français ont soigneusement nettoyé les os d'Arafat afin d'éliminer toute contamination extérieure avant de prélever et d'analyser les échantillons, et découvert les mêmes taux de polonium, a-t-il souligné.

«J'ai du mal à comprendre pourquoi d'un côté ils disent avoir soigneusement nettoyé les os et éliminé les contaminations, et d'un autre côté expliquent leurs mesures (de polonium) par la très forte contamination qu'ils ont soi-disant éliminée», a-t-il ajouté.

«C'est très difficile de suivre leur raisonnement», a-t-il estimé.

Les causes de la mort d'Arafat, décédé à l'âge de 75 ans dans un hôpital militaire près de Paris en novembre 2004 après une brusque détérioration de son état de santé, n'ont jamais été élucidées.

Après l'ouverture d'une enquête par la justice française, la tombe d'Arafat a été ouverte et une soixantaine d'échantillons ont été prélevés avant d'être répartis pour analyse entre trois équipes d'experts, suisse, française et russe.