Le bilan de la flambée de violences qui ensanglante l'Irak depuis janvier a grimpé à plus de 5800 morts jeudi après de nouvelles attaques ayant fait 48 morts, dont 32 dans un attentat dans un marché bondé au nord-est de Bagdad.

Les violences de plus en plus meurtrières font redouter une accélération des attaques à l'approche des élections générales du 30 avril, et les autorités observent avec inquiétude le rôle croissant d'Al-Qaïda dans le conflit en Syrie voisine, redoutant une propagation sur ses terres.

Jeudi, une voiture piégée a explosé près d'un café dans un marché bondé, tuant au moins 32 personnes au nord-est de Bagdad, ont indiqué un colonel de la police et un médecin.

L'attentat a également fait 40 blessés, ont ajouté ces sources, précisant qu'il avait eu lieu à Saadiyah, dans la province multi-communautaire de Diyala.

La voiture a explosé vers midi (4 h à Montréal) dans un secteur qui compte une importante communauté de Fayli, ou Kurdes chiites, dans une région que se disputent le gouvernement central et la région autonome du Kurdistan.

Les insurgés exploitent souvent les tensions entre les deux parties pour mener leurs attaques.

Un autre attentat à Diyala et une série d'attaques jeudi dans Bagdad, et à Mossoul, dans le nord de l'Irak ont tué 14 personnes, tandis que deux insurgés ont été tués par les forces de sécurité.

Des responsables de Diyala ont par ailleurs fait état de la récente découverte de 12 corps d'habitants qui avaient été enlevés par un groupe de personnes se présentant comme des membres des forces de sécurité.

Les 12 victimes ont été exécutées, et leurs corps jetés dans une rivière.

Mercredi, une série d'attentats à la voiture piégée et d'attaques à travers le pays s'est soldée par 59 morts et plus de 100 blessés.

Face à la flambée de violences qui ensanglante l'Irak depuis le début de l'année, le premier ministre chiite Nouri al-Maliki a demandé fin octobre la coopération de Washington pour lutter contre le réseau extrémiste sunnite Al-Qaïda, qui a revendiqué plusieurs de ces attentats, alors que les soldats américains ont quitté l'Irak il y a bientôt deux ans.

L'escalade de violence en Irak est liée au conflit en Syrie, qui a enhardi les groupes liés à Al-Qaïda, estiment des experts et des diplomates.

Le réseau terroriste «est parvenu à reconstruire ses forces dans certaines régions» irakiennes, a récemment déclaré à l'AFP Safa Hussein, conseiller national adjoint à la sécurité.

«Leur capacité à mener des attaques a augmenté», souligne-t-il. «Maintenant, ils ont les moyens de passer la frontière, et de puissants, très puissants alliés en Syrie.»

Selon lui, ces insurgés «comprennent qu'ils ne peuvent réaliser leur ambition d'établir un État. Ni celle de défaire le gouvernement».

Mais «ils peuvent établir un contrôle indirect sur certaines zones, et faire de l'État un État défaillant, ce qui crée un très bon climat pour leur épanouissement», souligne Safa Hussein.

La paralysie de l'appareil politique, entraînée en grande partie par les différends entre sunnites et chiites, et associée à une corruption endémique, contribue en outre à alimenter l'instabilité. Et l'État peine à fournir les services de base comme l'électricité et l'eau potable.

Les violences se déroulent également sur fond de profond mécontentement de la minorité sunnite envers le gouvernement dominé par les chiites, accusé en particulier de multiplier les arrestations arbitraires.

L'ONU et de nombreux diplomates ont appelé M. Maliki à adopter des réformes pour éviter une plus grande marginalisation de cette communauté.

Plus de 5800 personnes ont péri depuis le début de l'année dans des violences, dont 964 en octobre, le mois le plus meurtrier depuis avril 2008, selon des chiffres officiels.