Le secrétaire d'État John Kerry était vendredi à Kaboul pour tenter de faire avancer avec le président afghan Hamid Karzaï les difficiles négociations pour un accord sur la présence américaine en Afghanistan après 2014, les États-Unis manifestant des signes d'impatience.

Arrivé en fin d'après-midi pour une visite-surprise jusqu'à samedi, John Kerry a rencontré et dîné avec Hamid Karzaï, les deux hommes, qui se connaissent bien, plaisantant dans une ambiance détendue, selon les journalistes qui accompagnent le secrétaire d'État.

Mais l'atmosphère risque de s'alourdir au cours de discussions jusqu'à samedi qu'un responsable du département d'État a qualifié de «complexes».

Les États-Unis souhaitent sceller un accord rapidement, d'ici à une date-butoir fixée par le président Barack Obama et son homologue afghan à la fin du mois d'octobre.

«Un accord est non seulement souhaitable, mais aussi faisable», d'ici au 31 octobre, a martelé le diplomate américain, qui accompagne son ministre en tournée depuis dix jours en Asie.

Les États-Unis négocient depuis plusieurs mois avec le président Karzaï un accord bilatéral de sécurité (BSA) devant définir les modalités de la présence d'un contingent américain en Afghanistan après la fin de la mission de l'OTAN en 2014.

Mais Kaboul et le président Karzaï ont multiplié les signes de mécontentement ces derniers mois quant à la teneur des négociations.

Certes, a précisé le responsable du département d'État, M. Kerry n'est pas revenu vendredi en Afghanistan pour «boucler» les pourparlers et repartir avec un accord en poche.

«Nous allons discuter pour voir où nous en sommes et si nous pouvons progresser. Les négociations étaient en cours avant notre arrivée et elles se poursuivront après notre départ de Kaboul», a renchéri un autre diplomate américain.

L'un des points d'achoppement concerne l'exigence de Washington d'une immunité juridique pour ses soldats.

En Irak, les États-Unis comptaient maintenir un contingent au-delà de 2011, mais ils avaient finalement rapatrié l'ensemble de leurs troupes car Bagdad avait refusé d'accorder l'immunité juridique aux forces américaines.

Sur cette question ultra sensible comme sur d'autres points de l'accord, le président Karzaï avait prévenu lundi qu'il n'était «toujours pas satisfait» des discussions avec les États-Unis, qui le soutiennent pourtant depuis son accession au pouvoir après la chute des talibans il y a tout juste 12 ans.

«Les Afghans veulent être les alliés des Américains et des Occidentaux, mais ce traité doit préserver les intérêts de l'Afghanistan», avait mis en garde le chef de l'État afghan.

Son porte-parole Aimal Faizi avait même prévenu que la conclusion du traité était menacée par les exigences américaines, trop lourdes aux yeux de Kaboul, en matière d'opérations militaires contre des insurgés islamistes ou Al-Qaïda.

«La possibilité que les (Américains) puissent mener unilatéralement des opérations militaires est inacceptable», avait-il dénoncé.

Mais aux yeux des États-Unis, le temps presse.

«Il est clair que le gouvernement afghan est focalisé sur un accord qui réponde aux besoins de sécurité du peuple afghan. Nous sommes focalisés sur un accord qui offre une protection à nos troupes et un cadre nécessaire aux États-Unis et à nos alliés», a plaidé l'un des diplomates américains.

Et «plus cela prendra du temps, plus cela sera dur à planifier», a-t-il insisté, à propos d'une éventuelle présence américaine après 2014.

Il s'est notamment inquiété d'une «érosion de la détermination des alliés de l'OTAN» en Afghanistan.

Boucler un accord est en effet d'autant plus urgent que la majorité des quelque 87.000 soldats de l'OTAN doivent quitter l'Afghanistan d'ici à la fin 2014. Ce départ fait redouter une nouvelle flambée de violences dans un pays en guerre contre une insurrection des talibans.

Ce retrait s'effectuera de surcroît dans un contexte politique sensible, une élection présidentielle étant prévue le 5 avril prochain. Le président Karzaï, 55 ans, ne peut briguer un troisième mandat, selon la Constitution.

Un responsable du département d'État a souligné que ce scrutin était «un processus interne à l'Afghanistan» et qu'il était «peu vraisemblable que le secrétaire d'État s'engage sur le fond» à ce sujet.