L'ambassade d'Israël à Washington s'est moquée du président iranien Hassan Rohani sur Twitter, le dépeignant en «vendeur à l'international», «défenseur de longue date de la prolifération nucléaire» et «professionnel des relations publiques».

Sur son compte officielle, l'ambassade s'est interrogée sur ce à quoi ressemblerait la page LinkedIn - le réseau social pour les professionnels - du président iranien, qui a assuré mardi lors de l'assemblée générale de l'ONU que son pays n'était «pas une menace», ni pour le monde ni pour sa région.

«Depuis mon élection comme président iranien en 2013, j'ai développé et mené une campagne de relations publiques sans précédent pour le gouvernement iranien», écrit l'ambassade dans ce CV fictif de Hassan Rohani.

«Grâce à une série de déclarations, de tweets, d'opérations de communication et de sourires, j'ai réussi à transformer le régime des ayatollahs, ennemi des droits de l'homme, en régime modéré, source d'espoir au sein de la communauté internationale», ajoute l'ambassade.

Israël menacé d'isolement

Israël, en première ligne contre le programme nucléaire de Téhéran, risque de se retrouver isolé dans une communauté internationale réceptive au ton beaucoup plus conciliant adopté par le nouveau président iranien Hassan Rohani, selon des experts.

Lors de sa première grande sortie internationale depuis son élection le 14 juin, le président Rohani a réaffirmé à l'assemblée générale de l'ONU que son pays n'était «pas une menace», ni pour le monde ni pour la région.

Il a de nouveau assuré que l'Iran entendait utiliser l'énergie nucléaire «à des fins exclusivement pacifiques», et dénoncé les sanctions contre l'Iran, alors que nombre de pays occidentaux et Israël soupçonnent Téhéran de chercher à se doter de l'arme atomique sous couvert de programme nucléaire civil.

Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, qui doit s'adresser à l'ONU le 1er octobre, a réagi en dénonçant dans un communiqué un discours «cynique et totalement hypocrite».

Cette intervention «traduit exactement la stratégie iranienne qui consiste à parler et à gagner du temps pour faire progresser ses capacités à se doter d'armes nucléaires», a-t-il affirmé.

Le président iranien a également condamné, dans un entretien sur le réseau CNN, «les crimes que les nazis ont commis envers les juifs», prenant le contrepied de son prédécesseur Mahmoud Ahmadinejad qui avait nié le génocide nazi.

«La diplomatie du sourire de Rohani a atteint son but et Israël est désormais menacé d'isolement», a estimé mercredi le commentateur politique de la radio publique Chico Menache.

«C'est un véritable défi diplomatique pour Israël», souligne le professeur Uzi Rabi, spécialiste de l'Iran à l'Université de Tel-Aviv.

«La dernière fois que Nétanyahou était à l'ONU, il était beaucoup plus facile d'argumenter contre l'Iran. Je ne suis pas sûr que pousser de grands cris est le meilleur moyen à employer cette fois-ci», ajoute cet universitaire.

L'an dernier, Benyamin Nétanyahou s'était livré à un coup médiatique en brandissant pendant son discours devant l'assemblée générale un graphique sur lequel il avait tracé une ligne rouge que l'Iran ne devait pas franchir dans son programme nucléaire.

«Rohani star de l'ONU»

Selon le quotidien Yédiot Aharonot, le premier ministre va tenter de «minimiser les différences entre Rohani et Ahmadinejad en soulignant que le président actuel aspire aux mêmes objectifs : détruire Israël et attaquer l'ensemble du monde occidental».

Pour Emily Landau, de l'Institut d'études pour la sécurité nationale de l'Université de Tel-Aviv, l'amertume des responsables israéliens constitue une réaction «naturelle» à l'annonce d'une réunion jeudi à New York sur le nucléaire iranien en présence notamment des chefs de la diplomatie américain et iranien.

«Nétanyahou ne sera pas présent dans la salle des négociations, c'est pourquoi il essaye de rappeler les réalités aux États-Unis, à savoir qu'il n'y a aucune preuve d'un changement» de la politique nucléaire de l'Iran, ajoute cette chercheuse.

Israël redoute que de telles rencontres portent atteinte à ses efforts pour faire pression sur l'Iran, selon Raz Zimmt, un chercheur du Centre d'études iraniennes de l'Université de Tel-Aviv.

«Le gouvernement israélien et le premier ministre auront du mal à convaincre la communauté internationale de traiter l'Iran comme elle le faisait auparavant», prévoit-il.

«En Occident, on considère Rohani de façon totalement différente d'Ahmadinejad. Les Occidentaux ont raison, mais Rohani n'a présenté aucune proposition concrète sur le nucléaire», poursuit Raz Zimmt.

«Rohani est devenu la star de l'ONU», constate Uzi Rabi.

Selon ces chercheurs, les États-Unis pourraient avoir besoin d'un régime iranien plus coopératif pour des raisons qui ne sont pas toutes liées au programme nucléaire de ce pays.

«Une percée diplomatique avec l'Iran pourrait permettre de mettre un terme au désordre qui règne au Moyen-Orient», souligne Uzi Rabi, en ajoutant que l'Iran «profite de la saga syrienne».

Mais Emily Landau relativise l'importance de l'écart entre les positions des États-Unis et des Européens d'un côté, et d'Israël de l'autre.

«Il y a bien sûr des différences entre les positions américaine et israélienne. Mais il ne faut pas l'exagérer en en faisant une dispute», poursuit-elle.

La raison de la main tendue de l'Iran est «claire, il s'agit d'une réponse aux sanctions occidentales)», ajoute la chercheuse.