Le président afghan Hamid Karzaï a achevé samedi la mise en place du cadre juridique de la présidentielle d'avril 2014, un ensemble de lois très attendu par la communauté internationale et censé éviter une réédition du scrutin précédent, terni par des fraudes.

L'élection aura lieu le 5 avril prochain et permettra de désigner le successeur de M. Karzaï, qui dirige le pays depuis la chute des talibans en 2001 et ne peut briguer un troisième mandat, selon la Constitution.

Samedi, M. Karzaï a promulgué une loi fixant entre autres points les conditions pour se porter candidat au scrutin, a annoncé la présidence dans un communiqué.

Mercredi, le président afghan avait promulgué une première loi censée donner plus d'indépendance à la Commission électorale indépendante (IEC), chargée de veiller au bon déroulement de la présidentielle et qui avait été accusée de partialité envers M. Karzaï lors de l'élection de 2009.

L'entrée en vigueur de ces deux lois permet de donner un cadre légal à l'élection, qui avait été réclamé avec insistance par la communauté internationale et qui figurait parmi les conditions posées par les bailleurs de fonds de l'Afghanistan en échange d'une aide de 16 milliards de dollars.

«La promulgation de ces lois est un point positif. C'est la première fois qu'une loi électorale est adoptée via une procédure législative normale, avec un vote au Parlement et une promulgation par le président, sachant que le système électoral précédent avait été mis en place par décret présidentiel», a réagi Jandad Spinghar, directeur de la Fondation pour des élections libres et équitables en Afghanistan (Fefa), interrogé par l'AFP.

«Tout dépendra maintenant de la manière dont ces lois seront appliquées», et des choix qui seront faits pour désigner les membres de la Commission électorale indépendante et de la Commission des plaintes électorales (ECC), a-t-il ajouté.

Moins de femmes dans les conseils provinciaux

L'installation du cadre juridique «offre une forme de soulagement, dans le sens où cela signifie que le processus n'est pas resté bloqué», a estimé de son côté Martine van Bijlert, une experte de l'Afghanistan Analysts Network, un centre de recherche basé à Kaboul.

«Bien sûr, il y a toujours de la méfiance et le jeu politique pourrait entraîner certains à manipuler le système, mais l'entrée en vigueur de ces deux lois leur compliquera la tâche», a-t-elle dit l'AFP.

La présidentielle aura lieu dans un contexte tendu: le scrutin coïncidera avec le retrait progressif de la force internationale de l'OTAN en Afghanistan (Isaf), dont la majorité des soldats auront quitté le pays fin 2014 alors que les talibans ont gagné du terrain ces dernières années et que les négociations de paix avec les insurgés sont au point mort.

Pour Davood Moradian, directeur de l'Institut afghan d'études stratégiques, il est crucial de faire «de la présidentielle la priorité numéro un des Afghans et de la communauté internationale, et de pousser la population à se passionner pour le scrutin», une condition indispensable pour construire un pouvoir central fort à même de maintenir la stabilité du pays après le départ des troupes internationales.

Impliquer la communauté internationale est aussi le «meilleur moyen d'empêcher la présidence de manipuler l'élection», a-t-il dit.

La campagne électorale commencera le 17 novembre. Parmi les candidats potentiels figurent le frère du président et ancien député Qayoum Karzaï, l'ancien commandant anti-taliban et gouverneur de la province de Balkh (nord), Atta Mohammad Noor, et un ancien secrétaire général de M. Karzaï, Omar Daudzaï.

La loi promulguée samedi définit également les modalités des élections locales qui auront lieu le même jour que la présidentielle dans les 34 provinces afghanes.

Cette loi réduit de 25 à 20% le nombre de sièges accordés aux femmes dans les conseils provinciaux, un nouveau signe que, malgré des milliards de dollars dépensés par la communauté internationale depuis 2001, la défense des droits des femmes reste compliquée dans un pays marqué par le poids de la coutume.