Première Saoudienne à réussir l'ascension de l'Everest, Raha Mouharraq appelle les femmes de son pays, qui ne peuvent toujours pas conduire ou pratiquer librement des sports, à croire en elles mêmes.

La jeune fille et ses trois compagnons -un Qatari, un Palestinien et un Iranien- ont reçu un accueil triomphal à leur arrivée dimanche soir à l'aéroport de Charjah, aux Émirats arabes unis.

«C'était une expérience incroyable», a déclaré à l'AFP Raha Mouharraq, portant une abaya noire lui couvrant la tête.

«Je suis la première Saoudienne mais j'espère que je ne serai pas la dernière», à réussir cet exploit, a ajouté cette jolie brunette au large sourire. «Je crois que notre action va pousser les Saoudiennes à croire en leurs possibilités et à se lancer des défis».

Raha Mouharraq et ses compagnons sont parvenus le 18 mai au toit du monde, qui culmine à 8848 m.

Les quatre membres de l'équipe, tous diplômés de l'Université américaine de Charjah, ont effectué cette ascension pour rassembler des fonds destinés à aider à l'éducation des enfants du Népal.

«Nous avons réussi à collecter un million de dollars», a annoncé le Qatari, cheikh Mohammed ben Abdallah Al-Thani.

Partie le 3 avril de Jeddah, sa ville natale dans l'ouest du royaume saoudien, la jeune fille, âgée de 25 ans, avait déjà subi un entraînement rigoureux pendant un an et demi.

Avec l'ascension de l'Everest, elle a indiqué avoir réalisé son ambition de grimper sur les neuf sommets les plus hauts du monde, en Europe, en Afrique, en Amérique du sud et en Antarctique.

Mais elle a dû d'abord convaincre sa famille de la laisser partir à l'assaut de l'Everest, devenant ainsi la plus jeune arabe à le faire.

Dans une société extrêmement conservatrice, ses parents ont dû faire face à l'opposition de «plusieurs membres de la famille et des gens en Arabie saoudite en général», dit-elle.

«Je n'ai rien fait qui aille à l'encontre de ma culture et de ma religion», a assuré Raha Mouharraq.

L'Arabie saoudite suit une version extrêmement rigoriste de l'islam et les femmes ne sont pas autorisées à conduire ou à voyager sans la compagnie d'un proche.

Mais le roi Abdallah, un prudent réformateur, a nommé en janvier 30 femmes au Conseil de la Choura, une instance consultative, et autorisé les femmes à voter lors des prochaines élections municipales en 2015.

Le sport féminin est quasi-inexistant dans le royaume et les autorités viennent à peine d'autoriser sa pratique uniquement dans les écoles privées de jeunes filles. Sous la pression des instances sportives internationales, le royaume avait envoyé deux athlètes femmes aux Jeux olympiques de Londres de l'été 2012.

L'attaché culturel de l'ambassade saoudienne aux Émirats, Abdel Mohsen al-Harthi, se trouvait dimanche à l'aéroport pour accueillir sa compatriote.

«C'est un message pour les hommes avant les femmes d'Arabie saoudite, disant qu'une fille de ce pays est parvenue au sommet et est parfaitement capable de réaliser ce que font les hommes», a-t-il dit.

Comme beaucoup de femmes saoudiennes, Raha espère qu'elle pourra un jour prendre le volant dans son pays.

«Mais si c'est trop difficile à réaliser, il y a beaucoup d'autres choses importantes sans lesquelles nous pouvons exceller».

Son camarade palestinien, Raed Zeidan, a profité de l'ascension de l'Everest pour délivrer un message politique.

«Nous avons passé beaucoup de temps sur la montagne, nous avons rencontré des alpinistes du monde entier et je leur ai parlé de la cause palestinienne et de nos prisonniers dans les geôles de l'occupation israélienne», a-t-il dit aux journalistes.

Zeidan est le deuxième Palestinien à effectuer l'ascension de l'Everest après une femme, Suzanne al-Houby, qui a réalisé cet exploit en 2011, devenant ainsi la première arabe à parvenir sur le toit du monde.

Quant à cheikh Mohammed ben Abdallah Al-Thani, un jeune membre de la famille régnante du Qatar, il est le premier ressortissant de ce petit pays à parvenir au sommet de l'Everest.