Couvert d'éloges pour son courage, considéré comme un véritable héros après cinq longues années de captivité à Gaza, Gilad Shalit est aujourd'hui au coeur du scandale.

Depuis sa libération, le 18 octobre 2011, l'ancien soldat de Tsahal jouissait d'une popularité sans faille en Israël. Mais de nouveaux éléments dévoilés par la sécurité nationale et repris vendredi dernier par le quotidien de gauche Haaretz concernant les circonstances de son enlèvement le 25 juin 2006 semblent en voie de ternir l'image du jeune homme.

Première révélation du journal, Gilad Shalit avait été prévenu qu'une embuscade du Hamas était à craindre ce jour-là. Le Shin Bet - les services de renseignement intérieurs israéliens - avait mis l'armée en garde. Pourtant, malgré les avertissements de sa hiérarchie, Shalit s'est assoupi dans le char qu'il occupait avec trois autres soldats.

Il était tout juste 5h quand il a été réveillé par l'explosion d'une roquette. Ses camarades se sont précipités dehors. Ils paieront leur fuite de leur vie: ils ont immédiatement été tués par les deux assaillants islamistes.

De son côté, Gilad Shalit «décide de rester dans le char, de ne pas en sortir pour combattre», révèle Ben Caspit, journaliste auteur de l'enquête. Il n'a pas bougé. Il a attendu. Il n'a pas cherché à donner l'alerte aux troupes israéliennes alentour en tirant des coups de feu. Il s'est contenté de «prier pour que cela se termine».

L'un des deux attaquants islamistes a lancé deux grenades dans la tourelle du char. Le jeune soldat a alors décidé de sortir, abandonnant son fusil dans le char. Sans aucune difficulté, il a été fait prisonnier.

À la lumière de ces dernières révélations, le journaliste de Haaretz conclut, lapidaire: «Il n'a même pas fait le minimum pour éviter d'être capturé». Une opinion partagée par une partie de l'opinion publique, qui déplore la passivité de Shalit.

«Il a failli à son devoir»

Pour Roy, ancien soldat dans une unité combattante, qui préfère garder l'anonymat pour ne pas nuire à ses relations avec l'armée, le triste bilan de cette opération et le lourd tribut payé par Tsahal sont largement à attribuer à Gilad Shalit.

«Deux morts, un prisonnier, cela fait beaucoup. Il n'a rien fait pour se défendre, a multiplié les erreurs stratégiques et a complètement failli à son devoir», se désole-t-il.

L'ancien soldat, comme beaucoup en Israël, s'interroge désormais de plus en plus sur le bien-fondé de l'échange réalisé il y a deux ans entre le jeune homme et 1000 prisonniers palestiniens.

«Nous avons laissé sortir des gens dangereux pour la sécurité du pays contre quelqu'un qui s'est laissé faire sans opposer la moindre résistance. Cette négociation était une erreur stratégique majeure!», s'indigne encore Roy.

Un avis que ne partage pas Julien Salingue, chercheur en sciences politiques à l'Université Paris VIII et auteur de À la recherche de la Palestine. «Il y a toujours eu une aspiration très forte au retour des soldats, aux échanges en Israël. Je pense surtout que les Israéliens commencent à se demander ce que font des soldats aussi jeunes et inexpérimentés sur des terrains dangereux», analyse-t-il.

Autrefois fierté nationale, Gilad Shalit pourrait bientôt être considéré en Israël comme le symbole du malaise de certains jeunes par rapport à un devoir militaire bien souvent difficile à porter.