Yaïr Lapid, le centriste qui a réalisé une spectaculaire percée aux élections en Israël, a accepté mercredi la main tendue par Benyamin Nétanyahou, sur la base d'un programme de gouvernement social, en refusant de participer à un front contre le Premier ministre de droite sortant.

«J'ai entendu parler de bloc (anti-Nétanyahou), je suggère qu'on retire cette histoire de la table. Il n'y aura pas de bloc», a affirmé M. Lapid lors d'une courte allocution, au lendemain d'élections législatives qui ont vu son nouveau mouvement centriste devenir le deuxième parti d'Israël.

Le chef de Yesh Atid («Il y a un avenir»), lancé il y a un an, s'est réjoui «d'avoir entendu le Premier ministre reprendre à son compte tout ce que nous disons depuis un an sur l'égalité et la nécessité de protéger les classes moyennes».

M. Lapid a ainsi clairement annoncé son intention de faire alliance avec M. Nétanyahou dans un futur gouvernement.

Auparavant, «Bibi» Nétanyahou, sorti affaibli du scrutin, avait promis d'accorder la priorité aux dossiers sociaux.

«Les Israéliens veulent que je forme un gouvernement qui impulsera trois grands changements dans la politique intérieure: une plus grande égalité, des logements plus abordables et des changements dans les méthodes de gouvernement», a constaté M. Nétanyahou, qui est le mieux placé pour former le prochain cabinet.

Ce dernier, qui a essuyé un cuisant revers aux législatives de mardi, a répété qu'il voulait former «un gouvernement aussi large que possible».

Les trois priorités qu'il a présentées correspondent point par point aux grandes lignes du programme de M. Lapid.

Partenaire devenu incontournable pour constituer une majorité parlementaire, Yaïr Lapid milite pour la conscription des jeunes religieux ultra-orthodoxes, dont la plupart sont exemptés de service militaire, alors que le reste de la population est tenue de le faire.

Et si M. Nétanyahou est obsédé par le nucléaire iranien, M. Lapid, lui, a rejeté toute intervention unilatérale en Iran.

Défi budgétaire

Il se présente comme le porte-drapeau des classes moyennes, exigeant également une meilleure répartition du «fardeau» fiscal ainsi que des réformes pour abaisser le prix des logements, et prône une cure d'amaigrissement pour le gouvernement.

L'agence de notation Fitch a souligné mercredi que «le défi» pour le prochain gouvernement israélien sera de faire voter un budget 2013 prévoyant des coupes en raison d'un déficit deux fois plus important que prévu.

Après la publication des résultats officiels attendus en milieu de semaine prochaine, le président Shimon Peres doit désigner dans les sept jours le chef du parti ayant le plus de chances de constituer une majorité. Ce candidat dispose ensuite d'un délai de 14 jours pour constituer son gouvernement.

«Il n'y aura aucun gouvernement raisonnable -c'est-à-dire aucun gouvernement que Nétanyahou pourra diriger sans devenir un paria international- sans Lapid. Il est donc devenu l'acteur le plus important dans le système politique», a averti l'analyste Yossi Verter dans le journal Haaretz.

La liste commune formée par le Likoud de «Bibi» Nétanyahou et le parti ultranationaliste Israël Beiteinou n'a remporté que 31 sièges, contre 42 dans le Parlement sortant.

Néophyte sur la scène internationale, M. Lapid préconise une relance du processus de paix avec les Palestiniens, suspendu depuis 2010, tout en rejetant des concessions sur Jérusalem-Est annexée.

Paris a souhaité que le prochain gouvernement engage «très vite» les négociations avec les Palestiniens, et Washington a rappelé son attachement à une solution à deux États.

Mais les Palestiniens restent pessimistes sur une reprise des négociations.

«Je ne m'attends pas à l'émergence (...) d'un camp de la paix», a déclaré Hanane Achraoui, membre du Comité exécutif de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP).

Les Palestiniens sont «prêts à travailler» avec tout gouvernement israélien qui reconnaîtrait «l'État de Palestine», après le statut d'État observateur accordé par l'Assemblée générale de l'ONU, a renchéri le ministre palestinien des Affaires étrangères Riyad Al-Malki.