Le mollah Nazir, un influent chef de guerre pakistanais dont les hommes combattent l'Otan en Afghanistan, a été tué dans des tirs de drones américains qui ont fait une dizaine de morts dans des zones tribales du Pakistan, ont annoncé jeudi des sources sécuritaires.

Il s'agit d'un des combattants les plus importants tués au cours des dernières années par des tirs de drones américains dans le nord-ouest du Pakistan, région qui sert de base arrière aux talibans, afghans et pakistanais, et à des groupes liés à Al-Qaïda.

«Si cette information est vraie, alors il s'agirait d'un coup important, très utile non seulement pour les États-Unis, mais aussi pour nos alliés pakistanais», a affirmé jeudi un porte-parole du Pentagone.

Des missiles ont atteint un véhicule des insurgés dans le village de Sar Kanda, situé dans le Waziristan du Sud, district tribal considéré comme un des centres de la mouvance djihadiste dans le nord du Pakistan.

«Le mollah Nazir et cinq de ses combattants ont été tués. Deux commandants locaux», Atta Ullah et Rafey Khan, font partie de ces victimes, a dit à l'AFP un haut responsable de la sécurité.

Selon un autre responsable, ces tirs se sont produits tard mercredi soir, mais l'information n'a pu être confirmée avant jeudi matin, car l'attaque a eu lieu dans une région reculée et montagneuse adossée à l'Afghanistan.

Ses funérailles ont eu lieu jeudi à une dizaine de kilomètres de Wana, la principale ville du Waziristan du Sud, ont indiqué à l'AFP des habitants de la région.

Le mollah Nazir, considéré comme le plus important chef de guerre du Waziristan du Sud, avait été la cible de nombreux tirs de drones américains ayant causé la mort de membres de son entourage. Il avait aussi échappé fin novembre à un attentat suicide le visant dans un marché de Wana.

«Problème» pour l'armée pakistanaise

Âgé d'une trentaine années, le mollah Nazir était un allié du commandant taliban Hafiz Gul Bahadur, établi dans le district voisin du Waziristan du Nord. Les deux hommes ont fait du Waziristan leur base arrière pour lancer des opérations contre les forces de la coalition dans l'Afghanistan voisin.

«Les Américains et les Afghans soupçonnaient le mollah Nazir d'héberger des combattants arabes d'Al-Qaïda», a dit à l'AFP l'analyste pakistanais Imtiaz Gul. «Ils (les États-Unis et leurs partenaires de l'Otan) veulent éliminer tous les éléments actifs à la frontière afin de réduire les menaces représentées par Al-Qaïda contre les forces américaines en Afghanistan», a-t-il ajouté.

Le mollah Nazir était parvenu à un accord de paix en 2007 avec les autorités pakistanaises et entretenait des relations houleuses avec le Mouvement des talibans du Pakistan (TTP), groupe qui multiplie les attentats contre les forces pakistanaises contrairement aux talibans afghans, qui combattent les soldats de l'Otan et leurs alliés en Afghanistan.

Il était aussi l'un des chefs les plus influents de la tribu Wazir, rivale de la tribu Mehsud, dont est issu le commandement du TTP.

«Le mollah Nazir pouvait enrayer l'avance du TTP (au Waziristan), il unifiait aussi la tribu Wazir et ses combattants. S'il est bien mort, c'est un gros problème pour la tribu Wazir et l'armée pakistanaise», a commenté à l'AFP Saifullah Khan Mehsud, directeur du centre de recherche sur les zones tribales pakistanaises à Islamanad.

Sa mort rendra les choses plus difficiles pour les autorités pakistanaises, confrontées aux assauts nourris du TTP, et risque de créer encore plus de «chaos» dans la région, a-t-il pronostiqué.

Des responsables pakistanais du renseignement se sont réunis jeudi pour discuter de l'impact de la mort de Nazir sur le Waziristan du Sud. «Il y aura un contrecoup, car il était un des hommes qui empêchait le TTP d'opérer dans ce secteur», a commenté un responsable sous couvert de l'anonymat.

Un autre drone américain a causé la mort jeudi de quatre insurgés au Waziristan du Nord, ce qui porte à au moins dix morts le bilan de ces tirs au cours des 24 dernières heures.