La justice irakienne a condamné dimanche à mort par contumace le vice-président sunnite Tarek al-Hachémi, un des plus véhéments critiques du premier ministre chiite Nouri al-Maliki, pour avoir commandité le meurtre d'une avocate et d'un général.

Ahmed Qahtan, secrétaire particulier et gendre de M. Hachémi, a également été condamné à la mort par pendaison par le tribunal pénal de Bagdad.

Les deux hommes, réfugiés en Turquie, étaient poursuivis pour avoir fomenté l'assassinat de quelque 150 responsables irakiens, dont celui de six juges et du directeur général du ministère de la Sécurité nationale, des accusations que M. Hachémi conteste.

Tarek al-Hachémi se trouvait dimanche à Ankara, où il a rencontré le chef de la diplomatie turque Ahmet Davutoglu, selon un diplomate de haut rang.

Selon le diplomate, cette rencontre était prévue d'avance, mais elle a coïncidé avec la condamnation à la peine capitale de M. Hachémi. Il doit aussi être reçu par le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, qui l'a plusieurs fois assuré de son soutien personnel.

Dimanche, le tribunal a estimé que la responsabilité de MM. Hachémi et Qahtan dans les meurtres d'une avocate et du général Talib Belassim a été établie par des «preuves soumises à la cour» qui permettent de les condamner à la mort par pendaison.

Les trois juges ont suivi le réquisitoire de l'avocat général qui leur demandait de retenir ces deux chefs d'accusation, mais d'en abandonner un troisième portant sur le meurtre d'un haut responsable des forces de sécurité.

Dans leur plaidoirie, les avocats de la défense ont qualifié le procès de M. Hachémi d'injuste et accusé la cour de céder à des pressions politiques. Mais, les coupant dans leur élan, l'un des juges leur a lancé: «vous attaquez l'autorité judiciaire. Si vous continuez, vous devrez répondre de vos paroles».

Les trois juges n'ont eu besoin que d'une demi-heure de délibération pour parvenir à leur verdict.

Selon la législation irakienne, M. Hachémi et son gendre ont 30 jours pour faire appel de la sentence.



Un procès empreint de fortes tensions politiques

Le procès de Tarek al-Hachémi s'était ouvert en son absence le 15 mai dernier à Bagdad. Et au fil des audiences, l'accusé, depuis son refuge en Turquie, n'a eu de cesse de contester les accusations portées contre lui et d'incriminer son ennemi politique, le premier ministre Nouri al-Maliki, sur l'antenne des chaînes de télévision internationales.

Né en 1942, M. Hachémi avait accédé à la vice-présidence de l'Irak en avril 2006. Chef de file du Parti islamique d'Irak, auquel d'aucuns prêtaient des liens avec les insurgés sunnites, il avait ensuite fondé le Parti du renouveau (Tajdid, en arabe), membre du bloc laïque Iraqiya, dominé par les sunnites.

Victorieux en nombre de sièges remportés à l'issue des élections de 2010, Iraqiya avait été éclipsé par M. Maliki, qui avait été reconduit dans ses fonctions.

Réélu à la vice-présidence en 2010, Tarek al-Hachémi avait été accusé en décembre dernier, juste après le départ des troupes américaines d'Irak, de diriger des escadrons de la mort.

M. Hachémi et ses partisans dénonçaient depuis des mois une procédure à des fins purement politiques, s'inscrivant dans le conflit qui opposait depuis décembre Iraqiya, à M. Maliki, un chiite qu'ils accusent d'autoritarisme.

D'abord réfugié dans la province autonome du Kurdistan irakien, dont les autorités avaient refusé de le livrer à Bagdad, M. Hachémi était parti pour la Turquie en avril. Là aussi, les autorités refusent de l'extrader, malgré la demande d'arrestation internationale diffusée par Interpol pour avoir «financé des attaques terroristes» dans son pays.