Le Hamas, au pouvoir à Gaza, s'immisce de plus en plus dans les activités des ONG, afin de renforcer son contrôle sur la société civile, accusent des responsables d'organisations humanitaires et associatives.    

Le gouvernement du Hamas a récemment imposé de nouvelles obligations légales aux ONG et confié à son ministère de l'Intérieur la tutelle de la société civile, au grand dam de Salah Abdel Ati, directeur de la Commission indépendante des droits de l'homme.

« C'est une violation manifeste de la loi, qui dispose que seuls les ministères compétents supervisent les organisations dans leur domaine », affirme-t-il à l'AFP.

« Le gouvernement du Hamas veut limiter les activités de ces ONG et les contrôler », déplore-t-il.

En 2011, selon le rapport annuel de la commission, le ministère de l'Intérieur du Hamas a dissous cinq ONG et fermé les locaux de 38 autres, tandis que 196 ont subi des audits financiers et administratifs « en infraction à la loi sur les associations ».

Mais Tharwat Bik, directeur du département des ONG au ministère de l'Intérieur, déclare que « le ministère dispose de larges prérogatives en la matière et travaille en coordination avec les autres ministères ».

« Toutes les mesures de dissolution ou de fermeture d'associations ont été prises de manière légale », poursuit-il, assurant que le gouvernement « respecte les activités de la société civile ».

Mais Rasmi Damo, directeur de l'ONG Fikra (« idée » en arabe) qui promeut des projets culturels pour les enfants, largement financée par les donateurs étrangers, accuse le Hamas de « trafiquer les rapports financiers du ministère de l'Intérieur pour trouver des prétextes à la fermeture d'associations ».

L'année dernière, Fikra a reçu un important don du Danemark pour un projet, mais « le gouvernement du Hamas a refusé l'ouverture d'un bureau par le donateur, sans en donner les raisons, et les fonds ont été retirés », indique-t-il.

Le ministère de l'Intérieur a catégoriquement démenti, affirmant que l'organisation danoise « avait mis fin volontairement à ses activités à Gaza ».

Selon Rasmi Damo, le Hamas « vise en particulier les associations culturelles ou qui défendent la liberté de pensée, parce qu'il n'aime pas le contenu de leur message ».

« Le gouvernement du Hamas s'emploie à harceler et à fermer des organisations qui diffusent des idées éclairées et soutiennent la mixité entre hommes et femmes, comme nous l'avons vu avec le Forum Sharek pour la jeunesse (qui promeut l'intégration des jeunes Palestiniens dans la société: NDLR) », dissous l'année dernière à Gaza, confirme un employé d'une des plus grosses ONG dans le territoire palestinien.

Sous le couvert de l'anonymat, cet humanitaire accuse le Hamas de tenter d'imposer « ses membres dans les conseils d'administration de ces organisations en menaçant de les fermer ou de révoquer leur direction ».

En août 2011, l'Agence américaine pour le développement international (USAID) avait brièvement suspendu son aide dans la bande de Gaza pour contraindre le Hamas à renoncer à contrôler les comptes d'ONG financées par l'USAID.

« Le gouvernement du Hamas veut contrôler la société civile. Il vise les organisations dont il ne profite pas», résume Rasmi Damo.

Selon des analystes, près d'un tiers des organisations d'aide à Gaza sont des associations islamiques, dont le Hamas a favorisé l'implantation depuis sa prise de contrôle du territoire il y a cinq ans.