Israël a légalisé mardi trois colonies sauvages, une décision condamnée par le président palestinien Mahmoud Abbas qui attend un engagement au gel de la colonisation pour reprendre les négociations de paix.

Le gouvernement israélien a autorisé a posteriori les colonies de Bruchin (350 habitants), Rechelim (240 habitants), dans le nord de la Cisjordanie et Sansana (240 habitants), dans le sud du territoire palestinien.

Un comité ministériel ad hoc a «décidé de formaliser les statuts de trois communautés établies dans les années 90 à la suite de décisions de gouvernements précédents», a indiqué le bureau du premier ministre Benyamin Nétanyahou.

Un responsable israélien a souligné que «la décision ne change pas la réalité sur le terrain» et n'implique pas l'établissement «de nouvelles colonies ni l'extension de colonies existantes».

«La décision de légaliser trois colonies sauvages est la réponse prévue à la lettre du président Abbas au premier ministre Nétanyahou», a déclaré à l'AFP le porte-parole de M. Abbas, Nabil Abou Roudeina.

Dans un communiqué, le gouvernement palestinien a «condamné la poursuite par Israël du développement de la colonisation», ainsi que «la "légalisation" d'enclaves de colonisation», appelant la communauté internationale à s'y opposer «parce qu'elle détruit les chances de paix et d'une solution à deux États».

Le négociateur palestinien Saëb Erakat a remis le 17 avril à M. Nétanyahou une lettre de M. Abbas, exigeant pour reprendre les négociations de paix une série d'engagements, dont la reconnaissance des lignes de 1967 comme base de discussions et le gel de la colonisation.

Le premier ministre israélien doit répondre «dans les deux semaines».

Mais les responsables palestiniens anticipaient une réponse négative en s'apprêtant à relancer leurs démarches aux Nations unies.

«La question de la lettre palestinienne et de la réponse israélienne ne doit pas être surestimée, car nous connaissons la réponse israélienne», a souligné lundi une dirigeante de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), Hanane Achraoui.

«La prochaine étape devrait être l'Assemblée générale de l'ONU», habilitée à accorder à la Palestine le statut d'État non membre, a-t-elle estimé.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon s'est déclaré «profondément troublé» et déçu par la décision d'Israël, selon son porte-parole.

Les États-Unis se sont dits «préoccupés». La porte-parole du département d'État, Victoria Nuland, a rappelé que Washington était opposé aux activités de colonisation en Cisjordanie et déclaré que les États-Unis allaient demander à Israël, via leur ambassade à Tel-Aviv, des «clarifications».

«La France condamne cette prétendue légalisation qui envoie un signal très négatif, contraire aux intérêts de la paix dans la région», a réagi le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères Bernard Valero.

Le chef de la diplomatie jordanienne Nasser Jawdeh a également «condamné les activités de colonisation israéliennes ainsi que toute action unilatérale», lors d'entretiens à Amman avec l'émissaire américain David Hale.

Selon Hagit Ofran, responsable du mouvement israélien anticolonisation «La Paix maintenant», «c'est la première fois depuis 1990 que le gouvernement d'Israël décide de l'établissement de nouvelles colonies, et la manoeuvre du gouvernement, de mettre sur pied un comité pour l'établissement de colonies, est un tour de passe-passe pour cacher (sa) véritable politique».

Le gouvernement Nétanyahou a en outre décidé de demander à la Cour suprême un sursis à la démolition d'ici le 1er mai d'une trentaine d'habitations de la colonie sauvage d'Ulpana, près de Ramallah, en Cisjordanie, construites sur des terres privées palestiniennes, le temps de trouver une solution juridique pour les préserver.

«La décision de l'État de se soustraire à son obligation d'évacuation à la dernière minute (...) est une soumission inquiétante à des considérations politiques», a déploré dans un communiqué l'organisation israélienne de défense des droits de l'homme Yesh Din, en référence à l'influence du lobby des colons au sein du gouvernement.

Aux yeux de la communauté internationale, toutes les colonies sont illégales, qu'elles aient, ou non, été autorisées par le gouvernement israélien.

Plus de 340 000 colons israéliens habitent en Cisjordanie et plus de 200 000 dans des quartiers de colonisation à Jérusalem-Est.