Alors que la Tunisie célébrait le week-end dernier le premier anniversaire du départ du président Zine el-Abidine Ben Ali, les conséquences de la révolution tunisienne, qui a ébranlé l'ensemble du monde arabe, continue d'intéresser, voire d'inquiéter les leaders israéliens et palestiniens. Le point en quatre questions.

Q Quelles conséquences les soulèvements populaires ont-ils eues sur Israël?

R Les relations se sont tendues entre l'Égypte et Israël après la chute du régime d'Hosni Moubarak. La montée des islamistes et l'abrogation possible du traité de paix signé en 1979 inquiètent les dirigeants israéliens. Les États-Unis ont cependant annoncé que le mouvement des Frères musulmans leur avait garanti le respect du traité. «Pour Israël, c'est une période déstabilisante, qui jette le doute sur des questions stratégiques tenues pour acquises dans le passé, surtout en ce qui concerne l'Égypte, explique Bruce Maddy-Weitzman, spécialiste du Moyen-Orient de l'Université de Tel-Aviv. L'influence des Frères musulmans n'est pas bien vue. En Égypte, on s'attend à une lutte de pouvoir entre l'armée et les islamistes, ce qui promet d'être compétitif.» Même si plusieurs scénarios sont envisagés, il croit qu'Israël pourrait tirer profit d'un changement de régime en Syrie. Si un représentant de la branche sunnite de l'islam prenait le pouvoir dans ce pays, les liens avec l'Iran chiite pourraient vraisemblablement être affaiblis.

Q Quels impacts a eu le Printemps arabe dans les Territoires palestiniens?

R La réconciliation annoncée entre les leaders du Fatah, à la tête de l'Autorité palestinienne en Cisjordanie, et ceux du Hamas, dans la bande de Gaza, est grandement attribuée au Printemps arabe. Les deux mouvements étaient à couteaux tirés depuis 2007 après la prise de contrôle du groupe islamiste dans la bande de Gaza. Mais la réconciliation tarde à se concrétiser sur le terrain. «D'une certaine façon, les soulèvements ont affecté à la fois le Hamas et l'Autorité palestinienne, note Samir Awad, professeur de sciences politiques à l'Université Birzeit, en Cisjordanie. Le Hamas, parce que sa direction politique a perdu sa base en Syrie et devra s'établir ailleurs. Le Fatah, parce qu'il a perdu un allié en Égypte. Le Fatah comme le Hamas deviennent vulnérables.» Il croit que de grandes manifestations populaires pourraient ébranler les deux groupes en 2012.

Q Quels impacts pourraient avoir les soulèvements populaires sur des pourparlers?

R Des émissaires palestiniens et israéliens se sont rencontrés à Amman au début du mois de janvier pour la première fois depuis plus d'un an, même si les espoirs d'une reprise des pourparlers restent minces. Le rôle pris par la Jordanie dans cette rencontre n'est pas fortuit: le roi Abdallah semble vouloir occuper la place de médiateur laissée vacante par Hosni Moubarak, tout en calmant le jeu dans son propre pays. «Avec le Fatah et le Hamas qui essaient de former un nouveau gouvernement d'unité, pour pousser ensemble leurs demandes sur Israël, le gouvernement israélien pourrait vouloir prendre plus d'initiatives avec Mahmood Abbas, croit Bruce Maddy-Weitzman. Ce n'est pas dans l'intérêt d'Israël de voir le Hamas étendre son influence en Cisjordanie.» Il ajoute cependant que «dans un climat d'instabilité, il pourrait aussi attendre que la poussière retombe».

Q Qu'est-ce qu'on peut attendre pour les mois à venir?

R Le président de l'Autorité palestinienne Mahmood Abbas a averti que «toutes les options» seraient ouvertes si les pourparlers ne reprenaient pas avant le 26 janvier. La campagne pour l'adhésion d'un État palestinien à l'ONU n'est pas encore terminée. Des élections palestiniennes pourraient avoir lieu en mai prochain. Du côté israélien, la situation en Iran, soupçonné de se rapprocher de l'obtention de l'arme nucléaire à grands pas, continue de soulever des inquiétudes.