La police de Bahreïn a tiré des gaz lacrymogènes, vendredi, pour disperser des centaines de manifestants qui demandaient la démission du gouvernement après la publication d'un rapport sur la torture et d'autres abus commis contre des détenus.

Les manifestants ont marché pendant près de six kilomètres le long d'une autoroute qui traverse des quartiers chiites dans le nord de l'île. Après la marche, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés sur un rond-point, poussant la police à boucler la zone et à tirer des gaz lacrymogènes pour disperser la foule.

Les chiites de Bahreïn, qui représentent environ 70 pour cent des quelque 525 000 citoyens du royaume, se plaignent d'être discriminés par les autorités sunnites du pays, et notamment d'être exclus des hautes fonctions gouvernementales et de l'armée. La monarchie a offert certaines concessions, mais refuse d'accorder aux manifestants plus de droits et de libertés politiques.

Les militants accusent le gouvernement de ne pas avoir mis en application  les recommandations d'une mission d'enquête qu'il a lui-même autorisée. Le rapport de 500 pages de la mission, rendu public en novembre, a révélé qu'un certain nombre de détenus avaient été torturés de façon délibérée au plus fort du soulèvement populaire, en février et en mars.

«Aucun changement ne s'est produit», a dit Fatima Ahmad, une manifestante âgée de 24 ans. «Tous les policiers et les gens impliqués dans des violations des droits de la personne ont obtenu de nouveaux postes ou des promotions. Le gouvernement trompe son propre peuple et c'est pourquoi il doit démissionner.»

Le rapport de la mission d'enquête critiquait aussi le tribunal spécial créé en vertu de la loi martiale qui a imposé de lourdes peines, notamment des peines de mort, et qui a «nié à la plupart des accusés leur garantie élémentaire d'avoir droit à un procès équitable». Le gouvernement a levé la loi martiale en juin et a dissous le tribunal spécial.

Le rapport exhortait les autorités à réviser tous les verdicts prononcés par le tribunal spécial et à abandonner les poursuites contre les personnes accusées d'actes non violents, comme d'avoir participé aux manifestations ou de les avoir soutenues.

Cinq groupes d'opposition chiites ont estimé, dans un communiqué publié vendredi, que le gouvernement n'avait aucune intention de se conformer aux recommandations du rapport.

Les manifestants ont demandé la libération de tous les prisonniers politiques, dont certains ont été jugés par le tribunal spécial, et le jugement des policiers soupçonnés d'être responsables de la mort de plus de 35 manifestants depuis le début du soulèvement.

Mais les manifestants n'ont pas appelé à la chute de la monarchie sunnite, qui a remanié le gouvernement cette année sous la pression de la rue.