Après avoir exercé les plus hautes fonctions honorifiques en Israël en qualité de chef de l'État, Moshé Katsav, écroué pour viol, est la plus haute personnalité politique du pays à se retrouver en prison, y achevant dans le scandale une carrière sans éclat.

L'image d'un homme digne et intègre dont jouissait ce juif iranien à l'allure de grand-père sans histoires, âgé de 66 ans, a volé en éclats avec les premières révélations de multiples scandales sexuels qui l'ont contraint à la démission début 2007.

Depuis, l'ex-président s'est battu pied à pied, à l'aide de ténors du barreau, pour prouver son innocence en se présentant comme une victime d'un complot juridico-médiatique.

«Israël exécute un homme sur la base d'impressions sans témoignages fiables, sans preuve... On enterre un homme vivant», a-t-il proclamé mercredi juste avant d'être écroué.

Né en Iran en 1945, il est arrivé en Israël peu après la création de l'État en 1948. D'origine modeste, Moshé Katsav a réussi une spectaculaire ascension sociale.

Il fait de ses origines sépharades (juifs orientaux), longtemps considérées comme un handicap face à l'establishment ashkénaze (juifs européens), un atout pour se frayer un chemin au sein du Likoud, le grand parti de droite, qui a longtemps joué la carte du populisme.

En 1969, à 24 ans, il prend la tête de la municipalité de Kiryat Malachi, une localité à majorité sépharade près de Tel-Aviv, devenant le plus jeune maire d'Israël.

Diplôme d'histoire et d'économie en poche, Moshé Katsav monte ensuite d'un échelon en entrant au Parlement en 1977, lors de la première victoire de la droite aux législatives, se donnant volontiers une image de modéré par son ton mesuré et son pragmatisme.







Un «outsider» sépharade

Cette image et ses origines lui ont permis ensuite d'obtenir les portefeuilles de ministre des Transports puis du Tourisme. Orateur sans réel charisme, il a toutefois du mal à se mettre en avant, en se contentant des deuxièmes rôles au gouvernement.

Mais cette image consensuelle va le servir en 2000. Candidat à la présidence face à un candidat aussi prestigieux que Shimon Peres, symbole et incarnation du «pouvoir ashkénaze», il est donné battu.

Mais à la surprise générale, le Parlement élit cet outsider lors d'un vote à bulletins secrets avec le soutien du Shass, le puissant parti sépharade ultra-orthodoxe.

Installé à la présidence, ce père de cinq enfants, juif pratiquant, se veut le défenseur des «petites gens».

Le hasard le sert aussi parfois. Il a réussi ainsi un «coup» spectaculaire, en marge des obsèques du pape Jean Paul II au Vatican en 2005, en échangeant quelques mots en persan avec le président iranien d'alors, Mohammad Khatami, et en serrant la main du président syrien Bachar al-Assad.

Mais tout se grippe pour lui lorsqu'il commet l'erreur en 2006 de se plaindre auprès du procureur général d'une tentative de chantage de la part d'une de ses anciennes secrétaires qui l'accuse de viol.

La machine judiciaire se met en route. Mais d'accusateur, Moshé Katsav devient très vite le suspect. Les témoignages se multiplient et d'autres femmes sortent de leur mutisme et l'accusent d'avoir abusé de ses fonctions pour se livrer à une série d'agressions sexuelles. L'enquête aboutit finalement à son inculpation et à un procès.

Il commet ensuite sa deuxième erreur tactique en acceptant un compromis avec le procureur dans le cadre duquel il plaide coupable pour des délits sexuels en échange de l'abandon de l'accusation de viol beaucoup plus grave.

Mais un peu plus tard, soudainement, il dénonce cet arrangement et affirme être totalement innocent. Cette volte-face n'a fait que l'enfoncer davantage aux yeux de la justice. Tous ses appels ont été rejetés.