Importante source de revenus et symbole culturel, les oliviers occupent une grande place dans la vie des Palestiniens. La récolte est attendue comme une grande fête. Mais les agriculteurs dressent un bilan amer de la courte saison et se plaignent des nombreux obstacles auxquels ils font face.

De sa véranda, Hamdallah Hamidat montre son champ d'oliviers. Sa terre, dans le village de Sourif, en Cisjordanie, s'arrête à quelques centaines de mètres du mur qui sépare le territoire palestinien d'Israël. Lors du passage de La Presse au début du mois de novembre, deux hommes perchés sur des sceaux de plastique posés à l'envers sur le sol cueillaient les dernières olives de la courte saison commencée en octobre.

Le village, situé au sud de Jérusalem, non loin d'Hébron, compte environ 16 000 habitants. La majorité d'entre eux sont agriculteurs et environ 60% des villageois dépendent directement ou indirectement des revenus tirés de la récolte d'olives, selon l'ingénieur en agriculture Youssef Abu Maria.

«La récolte d'olives, c'est comme une célébration de mariage, illustre-t-il. C'est le moment de l'année où les gens obtiennent le meilleur de leurs terres, ce pour quoi ils attendent toute l'année.»

100 millions de dollars

Partout en Cisjordanie, la récolte d'olives est une activité importante. Le nombre d'oliviers, qui recouvrent près de la moitié de la terre agricole du territoire, est estimé à environ 10 millions. Les bonnes années, l'industrie de l'huile d'olive rapporte environ 100 millions US aux Palestiniens, dans des communautés parmi les plus pauvres, selon un rapport publié l'an dernier par Oxfam.

Mais cette année encore, la saison a été difficile. Manque d'eau, accès restreint aux terres, vandalisme, concurrence de produits moins coûteux; les agriculteurs palestiniens en ont long à dire sur les problèmes auxquels ils font face.

«La situation des agriculteurs est misérable», résume Hamdallah Hamidat. La liste des récriminations de l'ancien maire de 62 ans, qui cultive aussi les abricots, les pêches et les raisins, est longue. Il critique l'Autorité palestinienne, qui n'en fait pas assez pour favoriser les produits locaux, selon lui. Il se plaint de devoir subir des fouilles spontanées de soldats israéliens lorsqu'il se rend près du mur pour les récoltes.

Intimidation

Mais c'est sur une autre de ses terres, située dans un village voisin, qu'il estime avoir le plus de problèmes. Cette année, il dit avoir abandonné la récolte en raison de l'intimidation exercée par des colons israéliens qui habitent non loin de là.

«Les soldats israéliens viennent, mais ils arrivent toujours trop tard, note-t-il. Et souvent, ils sont protecteurs des colons.»

Durant les neuf premiers mois de l'année 2011, environ 7500 oliviers ont été déracinés, brûlés ou coupés par des colons extrémistes, estime le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies.

Dans les régions les plus sensibles, les activités doivent être coordonnées avec l'armée pour éviter les affrontements. Mais les agriculteurs estiment que les périodes allouées sur les terres sont alors trop courtes.

«Les oliviers ont besoin de soins, mais dans certaines régions, les fermiers ne peuvent y aller que pendant la période de récolte, et quelques heures à la fois seulement, dit Youssef Abu Maria. Et ce n'est pas tout le monde qui obtient un permis dans les zones où c'est nécessaire.»

Le Comité international de la Croix-Rouge s'occupe notamment de faciliter le dialogue avec les autorités israélienne et palestinienne pour coordonner les accès dans certaines régions. «Dans une certaine mesure, on peut constater un changement, dit la responsable du bureau du district d'Hébron, Barbara Lecq. On voit certaines situations où l'accès s'améliore. Certaines restent compliquées. Tout dépend de la localité.»

Las des problèmes occasionnés chaque année par la récolte d'olives, Hamdallah Hamidat a pour sa part décidé de diversifier sa culture en semant du blé, même s'il estime qu'il gagnera 50% de moins. «C'est une solution de rechange pour faire baisser les tensions avec les colons, parce que la récolte va se faire pendant une autre période de l'année, souligne-t-il. C'est sûr que j'aurais gagné plus si j'avais planté des oliviers. Mais je ne peux rien faire. Et l'Autorité palestinienne ne nous offre pas assez de services concernant l'agriculture.»