La justice iranienne a démenti mercredi la décision de libérer les deux Américains Shane Bauer et Josh Fattal annoncée la veille par le président Mahmoud Ahmadinejad, rééditant un scénario qui avait retardé la libération de leur compagne Sarah Shourd en septembre 2010.

«L'Autorité judiciaire dément les informations concernant la libération de deux Américains accusés d'espionnage», a indiqué un communiqué officiel du pouvoir judiciaire iranien, précisant qu'une demande de libération sous caution déposée par leur avocat était toujours «en cours d'examen par les juges chargés de l'affaire».

«Toute information sur ce sujet sera fournie par l'Autorité judiciaire, et aucune information d'aucune sorte émanant d'autres sources n'est valide», a souligné le communiqué officiel.

Le président Mahmoud Ahmadinejad avait annoncé mardi, dans une interview au Washington Post et à la chaine NBC, que les deux Américains détenus depuis juillet 2010 par Téhéran pour espionnage seraient libérés «dans les deux jours» à la suite d'un «geste humanitaire unilatéral» de l'Iran.

Leur avocat Massoud Shafii avait ensuite confirmé à l'AFP avoir été informé par les autorités judiciaires de la décision de libérer les deux Américains contre une caution de 500 000 dollars chacun. Les deux hommes «seront libérés dès que la caution aura été versée», avait-il ajouté.

Me Shafii a affirmé mercredi à l'AFP qu'à sa connaissance «rien n'avait changé» dans la décision des autorités judiciaires, mais qu'il manquait encore la signature d'un juge sur le document de libération sous caution et que celle-ci risquait d'être reportée jusqu'après le week-end iranien (jeudi et vendredi).

Shane Bauer et Josh Fattal, âgés de 29 ans, ont été condamnés chacun le 21 août à huit ans de prison par le tribunal révolutionnaire de Téhéran sous la double accusation d'espionnage et d'entrée illégale en Iran.

Ils ont toujours contesté l'accusation d'espionnage et ont fait appel de ce verdict.

Les deux Américains avaient été arrêtés le 31 juillet 2009 à la frontière irakienne avec une compatriote, Sarah Shourd, 32 ans, libérée en septembre 2010 pour des raisons humanitaires.

Ils ont toujours affirmé avoir franchi cette frontière par erreur après s'être égarés pendant une randonnée dans les montagnes du Kurdistan irakien.

L'annonce surprise de la libération de Shane Bauer et Josh Fattal par M. Ahmadinejad avait été accueillie mardi avec prudence par Washington, échaudé par les péripéties ayant entouré la libération de Sarah Shourd.

«Nous trouvons encourageant ce qu'a dit aujourd'hui le gouvernement iranien (...) Nous espérons bien sûr une issue positive à ce qui semble être une décision du gouvernement», a déclaré la secrétaire d'État Hillary Clinton.

La libération de Sarah Shourd avait déjà donné lieu à des discordances entre le gouvernement, qui avait été le premier à annoncer la libération de la jeune femme, et l'Autorité judiciaire, qui l'avait d'abord démentie puis retardée de quatre jours en invoquant des questions de procédure.

Le pouvoir judiciaire avait également vivement dénoncé l'ingérence de l'exécutif dans les affaires judiciaires.

La répétition mercredi, quasi à l'identique, de ce scénario illustre la persistance des tensions entre le gouvernement de M. Ahmadinejad et l'aile ultraconservatrice et religieuse dure du pouvoir, qui contrôle notamment l'appareil judiciaire et le Parlement.

Le sort des randonneurs américains a opposé, depuis le début de l'affaire, l'exécutif qui souhaitait leur libération rapide et le pouvoir judiciaire qui a toujours affirmé qu'ils étaient des espions devant être jugés.