Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a accusé mardi Israël de se comporter en «enfant gâté» et exprimé son souhait de se rendre à Gaza, ce qui devrait envenimer davantage les rapports entre la Turquie et Israël, deux anciens alliés.

M. Erdogan, qui dirige un gouvernement islamo-conservateur, a affirmé devant la presse qu'Israël «s'est toujours comporté comme un enfant gâté», dans une allusion aux reproches qui lui sont faits par la communauté internationale pour son attitude envers les Palestiniens.

Il a aussi indiqué qu'il pourrait se rendre à Gaza en marge d'une visite prévue la semaine prochaine en Égypte, mais qu'une décision finale n'avait pas encore été prise.

Une telle visite dans la bande de Gaza, dirigée par le mouvement islamiste radical palestinien Hamas, risquerait de porter un nouveau coup sur les relations entre la Turquie et Israël, en froid depuis plus de deux ans.

Israël considère le Hamas comme un «mouvement terroriste».

M. Erdogan a en outre annoncé la «suspension totale» des liens commerciaux et militaires avec Israël, après l'adoption la semaine dernière de sanctions contre ce pays qui refuse de s'excuser pour la mort de neuf Turcs tués en 2010 au cours d'un raid de l'armée israélienne dans les eaux internationales contre une flottille en route vers Gaza.

Cependant, un conseiller de M. Erdogan a tenté de clarifier ces propos: «La suspension concerne le commerce bilatéral dans le domaine de l'industrie d'armement et non le commerce en général», a-t-il déclaré à l'AFP.

Le ministre turc de l'Économie, Zafer Caglayan, avait de fait annoncé lundi que les relations commerciales avec Israël étaient maintenues.

Les échanges bilatéraux ont représenté environ 2,7 milliards de dollars pour la période janvier-juillet 2011, les exportations turques se chiffrant à 1,5 md de dollars tandis que les importations étant de 1,2 md de dollars, selon le ministre.

M. Erdogan a aussi souligné que «d'autres mesures de rétorsion» que celles annoncées vendredi contre Israël seraient prises, sans préciser lesquelles.

La Turquie a annoncé le 2 septembre des sanctions contre Israël pour son refus de présenter ses excuses pour l'abordage meurtrier d'un transbordeur turc en route pour Gaza par un commando israélien, le 31 mai 2010, qui avait coûté la vie à neuf Turcs.

Celles-ci sont l'expulsion de l'ambassadeur d'Israël, la suspension des accords militaires et la saisine de la Cour internationale de justice pour contester la légalité du blocus de Gaza par Israël.

M. Erdogan a en outre réaffirmé que les navires turcs «seront beaucoup plus présents dans cette zone», en allusion à la Méditerranée orientale où s'est produit l'abordage israélien, zone où Ankara a annoncé la mise en oeuvre d'une vigilance accrue pour sa marine.

Ankara a pris ces sanctions contre Israël à la suite de la publication jeudi dernier d'un rapport commandité par l'ONU estimant que l'armée israélienne avait eu recours à une force «excessive et déraisonnable» lors du raid contre le transbordeur turc, mais reconnaissant la légalité du blocus naval imposé par Israël à Gaza.

La Turquie et Israël étaient des alliés depuis la signature en 1996 d'un accord-cadre de coopération militaire. Israël a été en charge de gros projets de modernisation de l'armée turque.

L'ambassadeur d'Israël, Gaby Levy, se trouvait dans son pays au moment de l'annonce des sanctions. Le numéro 2 de l'ambassade, Ella Aphek, devait rentrer mardi, selon ses services.

L'attaché militaire israélien restera à Ankara et les services consulaires continueront aussi de fonctionner, a-t-on souligné de sources concordantes.

A Jérusalem, dans une première réaction aux propos de M. Erdogan, un responsable israélien a souligné que son pays «ne veut pas d'une nouvelle détérioration de ses relations avec la Turquie».