Un pas de plus a été franchi au Liban pour faire la lumière sur l'assassinat du premier ministre Rafic Hariri. Le Tribunal spécial sur le Liban, après avoir examiné la preuve déposée par le procureur Daniel Bellemare, vient de délivrer des mandats d'arrêt internationaux contre quatre suspects. Cinq choses à savoir sur la démarche juridique en cours.

Le crime

Le 14 février 2005, le premier ministre Rafic Hariri est tué avec 21 autres personnes quand une camionnette explose au passage de son convoi blindé sur la route du bord de mer, à Beyrouth.

Le mobile

Les regards se sont vite tournés vers la Syrie et la milice chiite Hezbollah. Peu avant son assassinat, Rafic Hariri avait fait part de son intention de renvoyer les troupes militaires syriennes présentes au Liban depuis près de 30 ans. Il avait aussi déclaré vouloir désarmer le Hezbollah, très présent dans le sud du pays. Après l'assassinat de Rafic Hariri, son fils, Saad, avait ouvertement accusé la Syrie du meurtre avant de renouer avec le pays lors de son propre passage à la tête du gouvernement libanais, entre 2009 et juin dernier.

Le tribunal

En 2007, à la demande du Liban, les Nations unies créent le Tribunal spécial sur le Liban pour faire la lumière sur l'assassinat de Rafic Hariri et d'autres personnes. Le 30 juin, le juge de la mise en état, Daniel Fransen, a confirmé un acte d'accusation préparé par le procureur Daniel Bellemare, ancien sous-procureur général adjoint du Canada. Cette confirmation signifie que le juge a estimé qu'il y avait suffisamment de preuves pour porter des accusations, mais il ne s'agit en rien d'un verdict de culpabilité. L'acte d'accusation ainsi que les mandats d'arrêt ont été transmis aux autorités libanaises. Lundi, le Tribunal a demandé à Interpol de transmettre ces mandats d'arrêt à tous les États.

Les suspects

L'identité des suspects reste officiellement confidentielle pour le moment, dit Martin Youssef, du bureau du Tribunal spécial sur le Liban, situé à La Haye, aux Pays-Bas. «Le Liban a maintenant 30 jours ouvrables pour informer le président du Tribunal des efforts faits pour arrêter les suspects. Après ces 30 jours, l'acte d'accusation deviendra public.» Cependant, les médias libanais ont récemment révélé l'identité des suspects avant que Beyrouth ne la confirme. Il s'agit de Moustafa Badreddine, Salim Ayyash, Assad Sabra et Hussein Anaiss, tous liés au Hezbollah. Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a indiqué que ces hommes «ont un passé honorable dans la lutte contre l'occupation» israélienne.

La traque

Personne n'a encore été arrêté. Le bras politique du Hezbollah, qui dirige le gouvernement libanais depuis juin, a promis de «coopérer avec le Tribunal» dans un message qui a «préoccupé» la France parce qu'il semblait mettre en doute l'impartialité de l'instance. Moins subtil que le premier ministre, le chef Nasrallah a accusé le Tribunal de vouloir «entraîner le Liban dans les querelles ou la guerre civile». Le «parti de Dieu», qui a déjà menacé de «couper la main» de ceux qui arrêteraient ses sympathisants, a prédit que jamais les suspects ne seront pris. «Ils ne peuvent ni les trouver ni les arrêter en 30 jours ou en 60 jours, ni en 1 an, 2 ans, 30 ans ou 300 ans», a déclaré Hassan Nasrallah. Si les suspects ne sont pas arrêtés après 30 jours d'appels publics, un procès pourra toutefois être entrepris en leur absence.