Il a fallu environ 30 minutes à chacun des quelque 500 détenus talibans pour parcourir les 300 m de tunnel souterrain, éclairé et ventilé qui leur a permis de s'évader de la prison de Kandahar, la grande ville du sud afghan, a raconté l'un d'eux mercredi à l'AFP.

«Nous savions depuis plusieurs jours déjà qu'il y aurait une opération, car nos chefs nous avaient informés que nous allions être secourus dans les jours à venir», a raconté le mollah Edris, qui se présente comme un taliban ayant pris part à cette «grande évasion» version afghane.

Il a été mis en contact téléphonique avec un correspondant de l'AFP à Kandahar par l'intermédiaire d'un porte-parole des rebelles.

«L'opération a commencé vers 22h30 locales cette nuit-là (de dimanche à lundi). Nos chefs nous ont rassemblés dans la cellule n°7» du quartier des «politiques» - les responsables ou militants talibans qui n'ont pas été arrêtés les armes à la main -, un bâtiment séparé de celui des détenus de droit commun.

À l'intérieur du bâtiment, une trentaine de cellules, selon le correspondant de l'AFP qui a visité la prison lundi et constaté que leurs portes étaient ouvertes, permettant aux détenus de circuler librement entre elles.

Un des 65 évadés repris après l'évasion, présenté avec deux autres lundi soir à la presse par les services afghans de renseignement, a indiqué que les portes des cellules n'étaient habituellement pas verrouillées la nuit.

Ni le mollah Edris ni les évadés repris n'ont évoqué la présence de gardiens dans le bâtiment la nuit de l'évasion, qui a duré plus de quatre heures selon les talibans.

Dans le sol de béton de la cellule n°7 a été percé un trou d'un mètre de diamètre, qui s'enfonce ensuite sur environ trois mètres dans la terre pour rejoindre le tunnel, a constaté le correspondant de l'AFP.

«Un par un, ils nous ont aidés à descendre dans le tunnel, il y avait un tuyau d'aération et de l'électricité à l'intérieur», explique le mollah Edris.

Le boyau est long de plus de 300 mètres, selon les talibans, qui disent avoir mis cinq mois à le creuser depuis l'intérieur d'une maison proche de la prison.

Une fois sous terre, s'ensuivent «20 à 30 minutes de marche», courbés en deux. Puis, «nous avons atteint l'autre côté du tunnel. Là, un commandant nous a pris notre argent et l'a réparti parmi les prisonniers, pour s'assurer que tout le monde ait de l'argent», poursuit-il.

Sur place, des camionnettes et des minibus attendent dans la nuit. La prison est située au bord de la route reliant Kandahar à Hérat, la grande ville de l'ouest du pays.

Il n'y a pas de place pour tout le monde: «Les commandants ont pris place dans les véhicules, nous, on nous a dit de marcher».

«Il y avait beaucoup de checkpoints sur le chemin», selon l'évadé. «Mais je n'ai été arrêté par des policiers qu'une seule fois. Ils m'ont demandé pourquoi j'étais pieds nus et pourquoi mes habits étaient couverts de poussière. Je leur ai répondu que j'étais cultivateur et ils m'ont laissé partir».

Il affirme être parvenu à quitter l'agglomération de Kandahar, sans vouloir préciser sa localisation. Son projet désormais: «Rejoindre les autres moudjahidines pour combattre le gouvernement et les étrangers».