La secrétaire d'État américaine Hillary Clinton s'est adressée directement à l'Iran vendredi pour lui demander un esprit «constructif» à la réunion prévue lundi à Genève sur les plans nucléaires de Téhéran.

«Nous espérons qu'au cours de cette réunion (...) nous verrons un dialogue constructif s'agissant de votre programme nucléaire», a-t-elle dit à la délégation iranienne qui participait, en même temps qu'elle, au dîner d'ouverture d'un forum sur la sécurité régionale à Bahreïn.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Manouchehr Mottaki, n'a pas regardé Mme Clinton lorsque celle-ci parlait, et n'a pas applaudi à la fin du discours.

L'appel de Mme Clinton, inchangé sur le fond, a toutefois été lancé sur un ton fort différent de celui, de plus en plus sévère, employé ces derniers mois par les responsables américains.

«Nous continuons à faire cette offre de dialogue dans le respect de votre souveraineté», a-t-elle expliqué, «mais aussi avec un engagement inébranlable à défendre la sécurité mondiale et les intérêts du monde dans une région du Golfe sûre et prospère».

Parlant un peu plus tôt à la BBC, Hillary Clinton avait également admis l'idée que l'Iran soit autorisé, «à l'avenir» et quand il aura rassuré sur ses intentions, à enrichir de l'uranium sur son sol avec la bénédiction des grandes puissances.

Les discussions prévues lundi et mardi à Genève interviennent après un an d'interruption. Elle mettront face à face l'Iran et les Six, ou «5+1» (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU: États-Unis, Russie, Chine, France et Grande-Bretagne, plus l'Allemagne).

L'Iran a fait l'objet de nouvelles sanctions de l'ONU en juin. Dans un entretien avec le blogueur Josh Rogin, la secrétaire d'État a estimé que l'effet de ces sanctions commençait à se faire sentir et jouait un rôle dans l'acceptation de la reprise du dialogue par Téhéran.

La République islamique continue, en tous cas, de nier que son programme ait des visées militaires. Et jeudi, elle a élevé le ton contre l'Occident, jugé responsable des récents attentats visant des scientifiques iraniens et réaffirmé qu'il n'était pas prêt à des «concessions».

Hillary Clinton a retrouvé au «Dialogue de Manama» les dirigeants cités dans les câbles américains dévoilés par le site WikiLeaks.

Dans l'un de ces documents qui jettent une lumière crue sur la perception de l'Iran par ses voisins, on apprend que le roi Abdallah d'Arabie saoudite a demandé aux États-Unis de «couper la tête du serpent».

Dans un autre, le roi Hamad ben Issa al-Khalifa de Bahreïn explique au général américain David Petraeus qu'il est moins risqué d'intervenir militairement en Iran que de laisser la République islamique poursuivre son programme nucléaire.

Questionné au côté de Mme Clinton lors d'un point de presse, son homologue bahreïni Khaled ben Ahmad Al Khalifa a refusé de commenter le détail des câbles révélés, mais a assuré que «ce qui a été mentionné est, de fait, notre politique».

«Nous le disons en public et nous le disons en privé», a poursuivi cheikh Khaled: Bahreïn approuve le développement civil de l'énergie nucléaire, mais «nous ne pourrons jamais accepter dans cette région» la présence de la bombe atomique.

Mme Clinton a élargi son propos au nucléaire nord-coréen, qui fera également l'objet d'une réunion au sommet lundi, cette fois à Washington.

La possession par Téhéran et Pyongyang d'armes nucléaires en vue de «menacer et d'intimider leurs voisins et au-delà», a-t-elle ajouté, «provoquera hélas une course à l'armement dans les deux régions».