Abdallah d'Arabie saoudite, un roi réformateur sous des apparences austères, a tenté de moderniser prudemment une société ultraconservatrice et d'accroître le rôle régional de son pays pour contrer les ambitions de l'Iran chiite.

Le souverain, 86 ans, doit être opéré de nouveau au dos aux États-Unis. Son âge et son hospitalisation ont relancé les spéculations sur sa succession à la tête de la monarchie des Al-Saoud, qui focalise l'attention d'autant plus que le royaume est le premier producteur de l'OPEP.

Après son intronisation en août 2005 à la mort de son demi-frère Fahd, Abdallah, qui dirigeait de facto le royaume depuis 1995, a poursuivi une lutte sans merci contre les militants d'Al-Qaïda auteurs d'une série d'attentats sanglants depuis 2003.

L'homme, qui a un certain franc-parler, n'avait pas hésité en 2007 à critiquer vertement l'«occupation illégitime» de l'Irak par les États-Unis, sous la présidence de George W. Bush, faisant traverser aux relations bilatérales une période de froid.

Ces relations se sont réchauffées sous l'administration Obama, en passe de vendre pour 60 milliards de dollars d'armements à Ryad.

En tant que prince héritier, il n'avait d'ailleurs pas soutenu l'invasion de l'Irak: conscient de l'anti-américanisme dans le monde arabe, il avait refusé d'autoriser les forces américaines à utiliser le territoire saoudien pour lancer leur assaut contre Saddam Hussein.

Il a parallèlement entamé une ouverture en direction des pays asiatiques -Chine, Inde et Russie. Mais est demeuré méfiant à l'égard de l'Iran chiite.

Les révélations de WikiLeaks révèlent un homme qui ne mâche pas ses mots. En parlant de l'Iran, il recommande aux États-Unis de «couper la tête du serpent» pour détruire son programme nucléaire.

Sur l'échiquier régional, il est l'initiateur d'un plan de paix au Proche-Orient, rejeté par Israël.

Sur le plan intérieur, il a conduit un très prudent processus de réformes en tentant de concilier une tradition musulmane ultraconservatrice avec une modernisation jugée inévitable.

Le royaume a organisé en 2005 des élections municipales partielles, les premières de son histoire, mais dont les femmes ont été exclues.

Le roi Abdallah, qui porte le titre de «Serviteur des deux Saintes mosquées» de La Mecque et Médine, a également lancé un dialogue interreligieux, thème d'un sommet à l'ONU à New York en 2008.

Il a aussi rencontré le pape Benoît XVI fin 2007 au Vatican, un évènement impensable voilà quelques années.

Né à Ryad, Abdallah est le 13e fils du roi Abdel Aziz, fondateur du royaume. Il est proche des tribus, pilier du pays qui fournissait les recrues de la garde nationale qu'il avait longuement dirigée.

Le roi aime se mêler à ses troupes et on le voit souvent danser avec ces hommes, un drapeau saoudien sur l'épaule et une épée à la main, au rythme de la «Arda», sorte de chant de ralliement à la dynastie des Al-Saoud.

Il a souffert de problèmes cardiaques à la fin des années 1980 et suit depuis un régime très strict.

Avant de se rendre aux États-Unis, il a cédé à son fils, Mitaab, la présidence de la Garde nationale, un corps formé d'hommes d'origine bédouine réputés pour leur loyauté et qui protègent les installations stratégiques (pétrolières), ainsi que la famille royale.

«Personne ne doute de sa piété», a dit un jour un diplomate occidental. Il est «le personnage le plus accepté par les détracteurs islamistes de la famille royale».

Contrairement à de nombreux membres de celle-ci, il passe pour être irréprochable sur le plan de la moralité.