La première visite au Liban du président Mahmoud Ahmadinejad, qui devrait se rendre dans le sud frontalier d'Israël, suscite d'ores et déjà une controverse au Liban, certains y voyant un message pour montrer que le pays est une «base iranienne» aux portes de l'État hébreu.

Le président iranien effectuera les 13 et 14 octobre une visite au Liban, où il doit s'entretenir avec le président Michel Sleimane, le premier ministre Saad Hariri et le chef du Parlement Nabih Berri.

Selon des responsables politiques, il doit également rencontrer Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, le puissant parti chiite allié de l'Iran et que Washington accuse d'être armé par Téhéran pour lutter contre Israël.

Il pourrait également se rendre dans le sud du Liban.

«C'est un message pour dire que l'Iran est à la frontière d'Israël», a dénoncé Farès Souaid, coordinateur général de la coalition du «14-Mars», majoritaire au Parlement et dont est issu le premier ministre Saad Hariri.

«Par cette visite, il veut dire que Beyrouth est une zone sous influence iranienne, que le Liban est une base iranienne sur la Méditerranée», a-t-il estimé.

Un responsable du Hezbollah sous couvert de l'anonyamat a affirmé vendredi à l'AFP que la visite dans le sud incluait un tour à Cana, village cible de raids israéliens meurtriers en 1996 et 2006, et à Bint Jbeil (5 km de la frontière), où de violents affrontements ont opposé soldats israéliens et combattants du Hezbollah lors de la guerre de 2006.

Il doit se rendre également au «musée de la Résistance» inauguré cette année à Mlita, selon cette même source. «Nous lui réservons un accueil populaire important».

«C'est une provocation, il n'a pas à aller là-bas», a dénoncé M. Souaid.

Pour la coalition majoritaire, soutenue par les États-Unis et l'Arabie, et qui critique l'«ingérence» de Téhéran au Liban et son influence auprès du Hezbollah, la visite de M. Ahmadinejad prend également une dimension régionale et internationale. Un communiqué de la coalition cette semaine avait estimé que le président iranien était «contre la paix».

«Au moment où les négociations sont en cours entre Palestiniens et Israéliens, le président iranien va dire que le Liban est une terre de "résistance" et réaffirmer son projet de guerre continue contre Israël», estime M. Souaid.

«Il rappelle à la communauté internationale que la sécurité d'Israël est entre les mains de son pays, à travers le Hamas (palestinien) et le Hezbollah et qu'il faudra donc négocier avec Téhéran,» poursuit-il.

L'Iran est soupçonné de chercher à se doter de la bombe atomique sous couvert d'un programme civil et est sous le coup de sanctions votées par le Conseil de sécurité de l'ONU.

Le numéro deux du Hezbollah, cheikh Naïm Kassem, a estimé au contraire que la visite de M. Ahmadinejad ne causait aucun «embarras» pour le Liban.

«Le message de cette visite est de réaffirmer l'importance de l'unité sur la scène libanaise», a de son côté affirmé l'ambassadeur de la République islamique, Ghazanfar Roknabadi.

Pour sa part, le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères  Yigal Palmor a jugé vendredi «inquiétante et déstabilisante» cette visite.

Il s'agira de la première visite du conservateur Ahmadinejad au Liban depuis son élection à la présidence en 2005. Il a été élu pour un second mandat en 2009.

La dernière visite à Beyrouth d'un président iranien avait été effectuée par son prédécesseur, le réformateur Mohammad Khatami, en mai 2003.

Le Hezbollah prône la lutte contre Israël et est considéré par les États-Unis comme un groupe terroriste.

Washington avait accusé en avril l'Iran et son allié syrien de livrer au Hezbollah des roquettes et des missiles de plus en plus sophistiqués pouvant être utilisés contre Israël, ennemi juré de Téhéran.