L'Iran a lancé samedi sa première centrale nucléaire construite par la Russie à Bouchehr, dans le sud du pays, en dépit des sanctions internationales contre son programme nucléaire soupçonné de dissimuler des visées militaires.

Les opérations de chargement du combustible dans le réacteur ont commencé samedi matin, en présence du vice-président Ali Akbar Salehi, chef du programme nucléaire iranien, et de Sergueï Kirienko, chef de l'agence nucléaire russe Rosatom qui a dirigé la construction de la centrale.

Le début du chargement du réacteur fait désormais officiellement de cette centrale une installation nucléaire.

M. Salehi a remercié la Russie pour avoir «accompagné la nation iranienne» dans la construction de la centrale, qui a connu de nombreuses vicissitudes.

«En dépit de toutes les pressions, sanctions et difficultés imposées par les pays occidentaux, le démarrage de la centrale de Bouchehr illustre la poursuite du programme nucléaire pacifique de l'Iran», a-t-il affirmé.

Le chargement des 163 barres de combustible livré par Moscou dans le coeur du réacteur devrait s'achever vers le 5 septembre. Il faudra ensuite environ deux mois pour que la centrale de 1000 mégawatts (MW) puisse être raccordée au réseau électrique fin octobre ou début novembre, selon l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA).

Le lancement de Bouchehr intervient alors que l'Iran est sous le coup de sanctions internationales après plusieurs condamnations de son programme nucléaire par le Conseil de sécurité de l'ONU qui soupçonne Téhéran, malgré ses dénégations, de chercher à se doter de l'arme atomique.

La Russie a obtenu de l'ONU que Bouchehr échappe à l'embargo international contre tout transfert d'équipements ou technologies nucléaires vers l'Iran, en s'engageant notamment à fournir pendant dix ans le combustible nécessaire à son fonctionnement et à le récupérer après usage pour réduire les risques de prolifération. La centrale va par ailleurs demeurer plusieurs années sous le contrôle conjoint de techniciens russes et iraniens.

M. Kirienko a affirmé samedi «le droit à l'énergie nucléaire pacifique» de l'Iran. Il a également rappelé que la centrale était «placée sous le contrôle de l'Agence internationale de l'énergie atomique» (AIEA).

La Russie a en outre récemment assuré que Bouchehr était «totalement protégée de tout risque de prolifération».

Les Etats-Unis ont également estimé samedi que le démarrage de la centrale ne représentait pas de risque de prolifération.

«Le réacteur de Bouchehr est destiné à fournir de l'énergie nucléaire à usage civil» et Washington «ne le voit pas comme (faisant peser) un risque de prolifération car il sera contrôlé par l'AIEA et car la Russie fournit le combustible» et le récupèrera une fois usagé, a déclaré à l'AFP un porte-parole du département d'Etat, Darby Holladay.

L'aide apportée par la Russie «démontre que l'Iran n'a pas besoin d'avoir ses propres capacités d'enrichissement si ses intentions sont pacifiques», a-t-il également indiqué.

L'enrichissement d'uranium par l'Iran inquiète particulièrement les Occidentaux, Etats-Unis en tête, et le Conseil de sécurité de l'ONU réclame en vain sa suspension depuis 2006.

Mais les besoins futurs de la centrale en combustible ont de nouveau été évoqués vendredi par M. Salehi pour justifier la poursuite de l'enrichissement d'uranium par l'Iran.

«L'enrichissement (d'uranium) pour produire du combustible pour la centrale de Bouchehr et d'autres installations continuera», a-t-il dit, en soulignant que l'accord pour la livraison de combustible russe était prévu pour dix ans alors que la durée de vie de la centrale est de 40 ans.

Il a cependant indiqué que l'Iran n'avait pas l'intention de poursuivre «éternellement» l'enrichissement d'uranium à 20%, qu'il se limitera à produire «en fonction de ses besoins».