Le gouvernement afghan a annoncé mercredi la création de milices locales chargées de défendre leurs villages contre les talibans, une initiative proche des milices anti-Al-Qaïda utilisées avec succès en Irak par l'armée américaine pour enrayer l'insurrection.

«Il s'agit d'une force de police locale. Ils assureront la sécurité de leurs maisons, de leurs hôpitaux et écoles, de leurs routes», a déclaré le vice-ministre de l'Intérieur, Mohammad Munir Mangal, lors d'une conférence de presse. «Nous avons travaillé main dans la main» avec les forces internationales pour finaliser ce projet, a-t-il précisé.

Ce programme, soutenu par l'armée américaine, est déjà en cours dans les provinces du Wardak (centre) et de l'Oruzgan (sud), des bastions de l'insurrection menée par les talibans. «Il sera étendu très vite au reste du pays», notamment dans le sud, le sud-ouest et l'est du pays, où se trouvent les fiefs insurgés les plus durs, a promis le vice-ministre.

M. Mangal a évoqué une force de 10 000 hommes, sans préciser si cela devait augmenter par la suite. Un chiffre modeste au regard de la taille de l'armée (134 000 hommes actuellement) et de la police (100 000 hommes), qui peinent déjà à maintenir la sécurité dans la pays sans les forces internationales.

Ces nouvelles forces dépendront du ministère de l'Intérieur et toucheront l'équivalent de 60% du salaire des policiers, qui perçoivent environ 200 dollars en bas de l'échelle.

Ils seront formés pendant trois semaines par des officiers de police et équipés en armes, à moins «qu'ils n'apportent les leurs», selon M. Mangal.

Le commandant des forces américaines et internationales, le général David Petraeus, et le président afghan Hamid Karzaï avaient trouvé un accord début juillet sur la création de cette «force de police locale».

Les États-Unis cherchaient en effet depuis 2009 à favoriser la création de ces milices dans l'espoir de favoriser une rébellion tribale à grande échelle contre les insurgés.

Mais le président Karzaï estimait à l'époque qu'il s'agissait d'une «mauvaise idée» qui allait «encore plus ruiner le pays».

Nombre d'observateurs soulignaient qu'il valait mieux renforcer la police, souvent considérée comme inefficace et très corrompue, et l'armée plutôt que refaire l'erreur du gouvernement pro-soviétique de la fin des années 1980.

Pour appuyer ses forces de sécurité défaillantes, celui-ci avait créé des milices tribales qui finirent par se retourner contre lui, ouvrant la voie à une féroce guerre civile à laquelle elles se livrèrent de bon coeur.

Aujourd'hui, le gouvernement prend bien soin de parler de «force de police» placée sous le commandement du ministère de l'Intérieur, et non de «milices tribales».

Le général Ben Hodges, responsable des opérations des forces armées américaines dans le sud afghan, avait indiqué début juin à l'AFP que les forces spéciales américaines aidaient déjà des villages afghans à organiser leur propre protection contre les talibans, notamment dans l'instable district d'Arghandab, dans la province de Kandahar (sud), fief des talibans.

Cette stratégie rappelle celle soutenue par l'armée américaine, dont le général Petraeus lui-même, en Irak à partir de septembre 2006 avec la création des milices Sahwas («Réveil» en arabe) composées d'anciens insurgés sunnites reconvertis dans la lutte contre Al-Qaïda. Ces agents irakiens avaient largement contribué à la stratégie de contre-insurrection du général David Petraeus, alors commandant des forces américaines en Irak, qui a permis une baisse progressif des violences en Irak.