Au moins 70 personnes ont péri en trois jours à Bagdad dans une multitude d'attaques contre des pèlerins chiites qui illustrent les difficultés des services de sécurité d'un pays englué depuis plusieurs mois dans une crise politique.

Plus de quatre mois après les législatives, aucun gouvernement n'a été formé et l'incertitude demeure sur le nom du prochain Premier ministre.

De nombreuses voix se sont élevées à Bagdad comme à Washington pour avertir du risque que ce blocage faisait peser sur la sécurité du pays, en pleine phase de retrait des troupes américaines de combat.

Car si les violences ont nettement diminué en Irak depuis le pic enregistré en 2006 et 2007, les groupes armés ont toujours la capacité de frapper fort.

En dépit du renforcement des mesures de sécurité pour les commémorations du décès de Moussa Kazim -le septième des 12 imams vénérés par les chiites- les centaines de milliers de pèlerins rassemblés à Bagdad ont visiblement constitué une cible facile pour les rebelles.

Au moins 70 personnes ont péri et plus de 400 ont été blessées depuis mardi dans une dizaine d'attentats contre les chiites dans la capitale.

Le plus sanglant a fait 28 morts et 136 blessés quand un kamikaze s'est fait exploser mercredi soir à Azamiya (nord), secteur sunnite par où passent de nombreux pèlerins en route vers le quartier chiite de Kazimiya, de l'autre côté du Tigre, où se trouve le mausolée de l'imam.

Les célébrations du deuil de Moussa Kazim, mort empoisonné en prison en 799 sur ordre du calife abbasside Haroun al-Rachid selon la tradition chiite, ont culminé mercredi soir.

Jeudi, les pèlerins, dont certains venus de l'étranger, tentaient de trouver des moyens de transport pour rentrer chez eux, générant de nouveaux attroupements visés par au moins cinq attentats, qui ont fait 11 morts et 111 blessés.

En juillet 2009, les forces irakiennes s'étaient félicitées que ce pèlerinage annuel se soit alors déroulé sans attentat majeur. Il faisait figure de test de leur capacité d'accomplir leur mission dans la foulée du retrait des forces américaines des villes.

La série d'attentats commis depuis mardi risque d'éclabousser une classe politique engluée dans les tractations sans fin.

Dans un communiqué, le représentant spécial en Irak du secrétaire général de l'ONU, Ad Melkert, a qualifié ces attaques de «crimes horribles contre des civils sans défense qui pratiquaient leur foi».

«La formation d'un gouvernement avec une large assise sera la réponse la plus efficace aux insurgés qui tentent de déstabiliser le pays», a estimé M. Melkert qui s'est cependant dit préoccupé quant à la capacité des partis à trouver un accord dans le délai constitutionnel de 30 jours fixé pour une nouvelle séance du Parlement, qui s'est réuni le 14 juin en séance inaugurale.

Le chef de la diplomatie irakienne, Hoshyar Zebari, a indiqué que les députés, chargés d'élire le Premier ministre et les présidents de la République et du Parlement, se réuniraient le 13 juillet.

En visite à Bagdad, le vice-président américain Joe Biden a exhorté dimanche les deux prétendants à la direction du gouvernement, le sortant Nouri al-Maliki et l'ex-Premier ministre Iyad Allawi, à mettre de côté leurs ambitions pour sortir leur pays de la crise.

M. Biden a également promis que le calendrier de retrait des 27 500 troupes américaines de combat restantes serait respecté. Le 1er septembre, le contingent américain sera de 50 000 militaires, contre 165 000 en 2007.