Le Conseil de sécurité des Nations unies a demandé mardi une enquête «impartiale» sur l'assaut israélien contre une flottille humanitaire pro-palestinienne à destination de Gaza, et condamné ces «actes» qui ont fait au moins neuf morts lundi. Les organisateurs de l'expédition ont affirmé qu'un nouveau cargo faisait route vers Gaza et qu'un bateau de passagers devrait le rejoindre.

À l'issue d'une réunion d'urgence et près de 12 heures de discussions à New York, les 15 membres du Conseil de sécurité ont adopté à l'unanimité une déclaration lue par l'ambassadeur du Mexique Claude Heller, dont le pays assure en juin la présidence du Conseil. Cette déclaration présidentielle, non contraignante et de moindre portée qu'une résolution, «regrette profondément la perte de vies humaines et les blessés» et réclame la libération «immédiate» des navires et civils détenus par Israël.

La Turquie, qui a rédigé le projet initial de déclaration, les pays arabes et les Palestiniens avaient réclamé une condamnation «dans les termes les plus vifs» et une «enquête internationale indépendante». Ces formulations n'ont pas été reprises dans le document adopté.

Le texte exhorte l'État hébreu à permettre aux pays concernés un accès consulaire afin de récupérer les corps des victimes et les blessés, et «assurer l'acheminement de l'aide humanitaire du convoi à sa destination». La situation dans la Bande de Gaza «n'est pas tenable», ajoute la déclaration, en insistant sur la «nécessité d'un flux soutenu et régulier de biens et de personnes vers Gaza». Il est également important que l'aide humanitaire soit fournie et distribuée «sans entrave» dans le territoire palestinien.

L'ambassadeur mexicain à l'ONU a expliqué que le terme d'enquête «impartiale» signifiait «indépendante», et que le secrétaire général Ban Ki-moon avait la responsabilité d'organiser les investigations, mais son homologue américain, Alejandro Wolff, a souligné que les États-Unis n'avaient pas la même interprétation. «Nous pensons que les Israéliens sont capables de la mener (l'enquête)», a-t-il déclaré, ajoutant que les États-Unis ne souhaitent «préjuger d'aucunes conclusions».

Le ministère israélien des Affaires étrangères, par la voix d'un de ses porte-parole, Yigal Palmor, a réagi en mettant en doute «l'objectivité» d'une éventuelle enquête internationale. «Au vu des pays qui soutiennent cette option, on a tout lieu de craindre pour son indépendance», a-t-il déclaré sur France Inter. «Dans les circonstances où cette proposition est soulevée, il est impossible de s'attendre à ce que les conditions d'objectivité et d'indépendance soient réunies», selon lui.

Le porte-parole, qui a fait état d'un bilan officiel de «neuf morts» et «un peu moins de 40 blessés», a réaffirmé que les commandos israéliens avaient «rencontré une violence inouïe» sur un des bateaux accostés et qu'ils avaient «dû se défendre», certains militants ayant «ouvert le feu».

L'opération a suscité de très nombreuses condamnations de la condamnation internationale, mais les critiques étaient également vives mardi dans la presse israélienne. Le quotidien Maariv titrait sur la «débâcle», estimant comme d'autres commentateurs et analystes que l'armée n'aurait pas dû envoyer de commandos à bord des bateaux.

Pour l'ancien général à la retraite Shlomo Brom, «il est clair, d'après le témoignage hier (lundi) de membres du commando, qu'ils n'étaient pas préparés à ce qui les attendait sur le pont» du «Navi Marmara», ferry turc et navire amiral de la flottille.

Sever Plocker, éditorialiste du principal quotidien israélien, «Yediot Ahronot», a pour sa part réclamé la démission du ministre de la Défense, Ehoud Barak. «Peu importe de savoir comment la décision de tomber dans le piège et la provocation du Hamas a été prise. Une seule chose compte: Ehoud Barak a failli et doit démissionner», estime le commentateur.

D'après les autorités israéliennes, environ 50 des 671 militants pro-palestiniens qui se trouvaient à bord de la flottille vont être expulsés du territoire israélien. Les autres personnes, qui ont refusé de décliner leur identité, restaient en détention.

La tension à la frontière entre Israël et Gaza était vive au lendemain du raid, et selon l'armée israélienne, des militants en provenance de Gaza ont tenté de s'infiltrer à l'intérieur de l'État hébreu, déclenchant une fusillade. Selon les services de secours israéliens, deux militants ont été tués, bilan non confirmé par l'armée.

À Chypre, où est basé le Mouvement pour Gaza libre à l'origine de la flottille, une des organisatrices, Greta Berlin, a déclaré qu'un autre cargo chargé d'aide faisait route vers Gaza. Un bateau transportant une soixantaine de passagers devait le rejoindre, a-t-elle ajouté, en assurant que «cette initiative ne va pas s'arrêter».