Le président afghan Hamid Karzaï effectue à partir de lundi une visite de quatre jours à Washington pour resserrer des liens avec l'administration américaine mis à mal ces derniers mois.

La rencontre entre le chef de l'Etat afghan et le président américain Barack Obama sera la première depuis le tollé provoqué par Hamid Karzaï qui avait accusé les Occidentaux d'avoir orchestré les fraudes massives lors du scrutin présidentiel du 20 août dernier.

«C'est une visite d'une rare importance pour l'avenir des relations entre l'Afghanistan et les Etats-Unis, pour le partenariat stratégique entre nos deux pays, pour la guerre contre le terrorisme», a indiqué le chef de la diplomatie afghane, Zalmai Rasoul.

Une quinzaine de responsables afghans, dont dix ministres, accompagnent M. Karzaï. La délégation doit aussi rencontrer des membres du Congrès américain.

L'image du président afghan, installé au pouvoir avec l'aide des Occidentaux après la chute des talibans fin 2001, a été sérieusement écornée par sa réélection en novembre dernier au terme d'une élection présidentielle entachée de multiples irrégularités.

Mais après des échanges ces derniers mois où les Etats-Unis ont pu faire douter de leur soutien inconditionnel à M. Karzaï, l'heure est à l'unité alors que se profile une offensive délicate à Kandahar, berceau des talibans, dans le sud de l'Afghanistan.

«Karzaï a besoin du soutien économique et politique des Etats-Unis», rappelle l'analyste politique Waheed Mujda.

«Cette visite est très importante pour lui au moment où on peut avoir l'impression qu'il a perdu le soutien de l'administration Obama», ajoute-t-il.

Des tensions entre Américains et Afghans

Les tensions entre Américains et Afghans avaient atteint un sommet quand le président afghan avait accusé les Occidentaux d'être responsables des fraudes en sa faveur lors du scrutin.

Washington avait fait planer la menace d'une annulation de la visite du président afghan avant que M. Obama n'écrive une lettre à son homologue lui réaffirmant son soutien.

Depuis, les responsables américains à Kaboul, de l'ambassadeur au patron des forces internationales, le général Stanley McChrystal, s'attachent à présenter M. Karzaï comme un «partenaire fiable» dans la guerre contre l'insurrection talibane.

La semaine dernière, le général McChrystal a fait part au président Obama de progrès «lents mais constants», selon la Maison Blanche.

De son côté, le président afghan estime que les forces internationales ont «encore beaucoup de chemin à faire» avant la victoire.

Le voyage de M. Karzaï intervient à quelques semaines d'une «jirga», une conférence de paix réunissant des centaines de chefs tribaux à Kaboul.

Lors de ce rassemblement crucial, prévu fin mai, M. Karzaï doit tenter de convaincre les talibans d'accepter son programme de réconciliation.

Le président afghan va notamment proposer emplois et argent aux talibans qui déposeraient les armes, grâce aux 140 millions de dollars qu'il a obtenus de la communauté internationale lors de la conférence de Londres fin janvier.

«Karzaï tentera de convaincre les Etats-Unis que la jirga est un pas dans la bonne direction et non pas un pas vers la talibanisation de l'Afghanistan», estime Ahmad Sayeedi, analyste politique à Kaboul.

Mais le président afghan devra certainement s'expliquer sur les lenteurs à lutter contre la corruption, fléau auquel il est accusé de participer.

«Karzaï est bon pour une séance de questions difficiles au Congrès pendant sa visite», souligne M. Sayeedi. «Politiquement et diplomatiquement, son voyage sera présenté comme un succès dans les médias. Mais la réalité, c'est que les problèmes de l'Afghanistan sont compliqués».