Bien qu'il s'en défende en public, le gouvernement de Benyamin Nétanyahou a imposé de facto un gel des constructions israéliennes à Jérusalem-Est, a appris l'Associated Press lundi auprès de responsables municipaux.

Le même jour, le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a laissé entendre qu'il serait prêt à entamer des pourparlers indirects avec Israël.

Interrogé sur la chaîne israélienne Channel 2, Mahmoud Abbas a déclaré qu'il allait soumettre cette semaine à la Ligue arabe la proposition américaine pour une reprise des pourparlers et que les Palestiniens «espèrent que la réponse sera positive».

Le dirigeant palestinien doit consulter samedi les représentants de la Ligue arabe sur ces pourparlers indirects. Lors des précédentes consultations, il avait reçu le feu vert des pays arabes. Leur approbation lui donnerait plus de poids pour tenter de convaincre une opinion publique sceptique.

Les États-Unis ont proposé des pourparlers indirects entre Israël et l'Autorité palestinienne, l'émissaire du président Barack Obama, George Mitchell, servant d'intermédiaire. Mais l'ouverture de tels pourparlers est bloquée depuis plusieurs semaines, les Palestiniens ayant suspendu leur accord à la suite de l'annonce par Israël de nouvelles constructions à Jérusalem-Est.

L'État hébreu avait provoqué la colère des États-Unis il y a un mois et demi quand, en pleine visite du vice-président Joe Biden, le ministère israélien de l'Intérieur avait annoncé l'approbation de 1 600 logements juifs dans la partie arabe de la ville, revendiquée par les Palestiniens. Une décision jugée provocatrice, au moment même où M. Biden tentait de ramener les Palestiniens à la table des négociations. Pour reprendre les pourparlers indirects, les Palestiniens exigent un gel préalable de la colonisation.

«Tout de suite après l'incident Biden, le gouvernement a ordonné au ministère de l'Intérieur de ne même plus parler de nouvelles constructions de logements juifs à Jérusalem-Est», a rapporté le conseiller municipal Meir Mergalit. Ce membre du parti Meretz (gauche) a dit tenir ces informations de hauts responsables municipaux directement impliqués dans les projets immobiliers. «Ce n'est pas simplement que les chantiers ont cessé: les comités qui s'occupent de ces questions ne se réunissent même plus».

Alors qu'il se réunissait une fois par semaine auparavant, le comité du ministère de l'Intérieur chargé d'approuver les projets de construction n'a pas été convoqué une seule fois depuis la visite de Joe Biden, a rapporté le conseiller municipal Meir Turujamen, membre de ce comité.

«J'ai écrit une lettre il y a environ trois semaines ou un mois pour demander (au ministre de l'Intérieur Eli) Yishai pourquoi le comité ne se réunissait pas», déclare M. Turujamen. «A ce jour, je n'ai pas reçu de réponse».

Ce comité s'est réuni pour la dernière fois le 9 mars, précise le conseiller municipal, et c'est ce jour-là qu'il a décidé d'approuver les 1 600 logements de Ramat Shlomo.

M. Turujamen dit ne pas avoir été informé d'un gel. «Mais d'après la situation, ce sont les faits», observe-t-il. «Il est clair qu'il y a un ordre».

Le négociateur palestinien Saeb Erekat affirme également ne rien avoir entendu d'officiel sur un éventuel gel des constructions israéliennes à Jérusalem-Est. «Ce qui compte pour nous, c'est ce que nous verrons sur le terrain», dit-il. «Nous espérons que le gouvernement israélien cessera les activités de colonisation afin que nous puissions donner aux discussions indirectes la chance qu'elles méritent».

Le porte-parole du gouvernement israélien Mark Regev a refusé de confirmer un gel, se contentant de rappeler: «Après l'incident lors de la visite de M. Biden, le Premier ministre a demandé à ce qu'un mécanisme soit mis en place pour empêcher que ce genre de débâcle ne se reproduise».

Efrat Orbach, porte-parole du ministère de l'Intérieur, assure que c'est la mise en place de ce mécanisme qui explique que le comité ne se soit pas encore réuni. Désormais, plusieurs ministères doivent se coordonner, a-t-elle souligné: «Il n'y a aucun gel. Il y a de la bureaucratie».

Benyamin Nétanyahou lui-même a démenti tout gel lundi, devant les membres de son parti, le Likoud, selon le député Danny Danon, qui assistait à cette réunion. «Si nous voyons qu'il y a un gel, nous ne resterons pas assis calmement et le Premier ministre le sait», a mis en garde l'élu Likoud. «Cette coalition ne laissera pas le Premier ministre geler les constructions à Jérusalem».