Semblant ne jamais être à court d'idées, Al-Qaeda en Irak a adopté une nouvelle tactique consistant à louer des appartements ou des magasins à Bagdad pour y entreposer des explosifs puis les faire sauter afin de tuer le maximum de personnes, selon des responsables.

L'armée et la police irakiennes doivent désormais adapter leurs opérations à ce nouveau type d'attentats qui ont coûté la vie à des dizaines de personnes depuis les élections législatives du 7 mars. Ils ont été baptisés par les militaires américains HBIED (maison piégée avec des engins explosifs), après le IED (engin explosif artisanal) et le VBIED (voiture piégée).

«Nos forces se concentrent sur les appartements et édifices récemment loués», confie à l'AFP le général Qassem Atta, porte-parole du commandement militaire irakien à Bagdad, notant que les insurgés sont toujours à l'affût de failles dans les mesures de sécurité.

«Ils modifient périodiquement leurs méthodes car nous réussissons à déjouer la majorité de leurs plans. Je crois qu'ils cherchent une nouvelle tactique d'attaque, peut-être s'en prendre à des ponts ou des églises», ajoute-t-il.

Au moins 25 personnes ont péri le jour des élections dans l'effondrement de deux immeubles à Bagdad dû à des explosions. L'armée américaine a accusé Al-Qaeda, précisant que les appartements où étaient entreposés les explosifs avaient été loués récemment.

Un mois plus tard, 35 civils sont morts ensevelis sous les gravas de maisons et magasins situés en majorité dans des quartiers chiites. Le général Atta avait alors parlé de «guerre ouverte» contre Al-Qaeda et les affidés de l'ex-dictateur Saddam Hussein.

Un commerce avait été loué deux jours avant les attentats et des inconnus y avaient ensuite déposé du matériel explosif, a indiqué à l'AFP un responsable irakien de la sécurité.

Des experts de l'antiterrorisme assurent que cette nouvelle tactique ne fait pas l'unanimité au sein du réseau extrémiste sunnite.

«Cette stratégie n'est pas appréciée par beaucoup d'insurgés mais (cela leur permet) de contourner les mesures prises pour les contrer», affirme Brian Fishman, expert de la fondation New America basée à Washington.

«Le service de propagande d'Al-Qaeda en Irak a désavoué ces méthodes et a demandé à ses militants de transmettre largement ce message mais cela ne signifie pas pour autant qu'Al-Qaeda n'en est pas l'auteur», a-t-il ajouté.

Le porte-parole militaire américain, le général Steve Lanza, convient que les insurgés, notamment Al-Qaeda, ont adapté leur tactique. «La menace terroriste qui existe dans le pays continuera, explique-t-il. L'un des moyens d'action consiste à détruire des immeubles pour provoquer d'importants dégâts et de nombreuses victimes. L'objectif est d'attiser la violence confessionnelle mais ils n'ont pas réussi pour le moment».

Une série d'attaques, notamment contre des bâtiments publics, ont tué depuis août 2009 quelque 400 personnes et miné la confiance de la population dans les forces de sécurité.

L'absence d'un réel vainqueur aux législatives fait craindre un «vide politique» qui pourrait être exploité par les insurgés après le retrait des troupes de combat américaines en août, étape préliminaire à un retrait total fin 2011.

«Les rues ne peuvent pas être totalement sous contrôle. Quand les policiers ou les soldats ont un doute, ils fouillent le coffre d'une voiture mais ignorent d'autres parties du véhicule qui peuvent être remplies d'explosifs», assure un militaire irakien sous couvert de l'anonymat.