Le président afghan Hamid Karzaï a rallié jeudi la communauté internationale à sa nouvelle stratégie de la «main tendue» aux talibans repentis, lors d'une conférence à Londres sur l'avenir de l'Afghanistan, réunissant près de 70 pays.

«Nous devons tendre la main à tous nos compatriotes, en particulier nos frères désabusés qui ne sont pas membres d'Al-Qaeda ou d'une autre organisation terroriste», a déclaré M. Karzaï en présentant son plan de «réconciliation» avec les talibans, qui propose argent et travail aux insurgés repentis. «Les participants à la conférence ont accueilli favorablement les projets du gouvernment afghan d'offrir une place honorable dans la société à ceux qui veulent renoncer à la violence», ont répondu les délégués de la conférence, selon un projet de communiqué final dont l'AFP a obtenu copie.

Mais les talibans concernés devront «respecter les principes inscrits dans la constitution afghane, couper leurs liens avec Al-Qaeda et les autres organisations terroristes et poursuivre leurs objectifs de manière pacifique», avertit le texte.

Un fonds international est créé pour soutenir la réintégration, sans que le montant en soit précisé. Selon des sources diplomatiques allemandes, il réunirait 500 millions de dollars.

Une «jirga de la paix» (assemblée tribale traditionnelle, ndlr) sera de plus réunie en Afghanistan «pour mettre en oeuvre cette réconciliation», a annoncé M. Karzaï. Les talibans y seront invités, a indiqué à l'AFP un de ses porte-parole. La convocation d'une jirga est essentielle à la mise en place effective du plan de réintégration, soulignaient des diplomates.

Mais les quelques dizaines de manifestants installés près du lieu de la rencontre, dans le centre de Londres, étaient dubitatifs: «On n'a pas fait toute cette guerre pour avoir de nouveau les talibans», a dit Tahmina Yousofi, 32 ans, docteur qui a fui l'Afghanistan il y a trois ans.

La rencontre, une des plus importantes jamais organisées sur l'Afghanistan, a également accéléré le transfert aux Afghans de la responsabilité en matière de sécurité.

Le projet de communiqué souhaite «une transition le plus rapidement possible» et le transfert du «commandement d'un certain nombre de provinces aux forces armées afghanes, à condition que les conditions le permettent, d'ici la fin 2010, ou le début de 2011».

La conférence a permis à «l'Afghanistan et la communauté internationale» d'entrer dans une «nouvelle phase» vers une pleine souveraineté afghane, ajoute le texte.

Pour accompagner la transition, les forces de sécurité afghanes seront portées à 300.000 d'ici octobre 2011, «beaucoup plus que les forces alliées», a dit le premier ministre britannique Gordon Brown dans un discours.

Le président Karzaï a de son côté fait part de son «intention d'assumer progressivement, d'ici à deux ou trois ans, la sécurité dans un plus grand nombre de régions» du pays. Cependant, aucun calendrier de retrait des alliés n'est fixé.

Besoin d'aide pendant 10 à 15 ans

Dans une interview à la BBC, M. Karzaï a prévenu que son pays pourrait avoir encore besoin d'une aide internationale «pendant 10 à 15 ans».

«Il doit être clair (...) que ce n'est pas une stratégie de sortie», a averti de son côté la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton. «Il s'agit d'établir les conditions qui permettront aux forces afghanes de prendre la direction en toute sécurité dans une zone donnée... Et nous continuerons à soutenir nos partenaires afghans pendant la transition», a-t-elle indiqué.

La conférence sera suivie par une autre rencontre internationale sur l'Afghanistan, qui devrait avoir lieu à Kaboul en mars ou avril.