L'armée yéménite, soutenue par les chars et l'artillerie, a annoncé samedi avoir lancé un nouvel assaut contre l'insurrection du nord du pays, menée par des rebelles chiites.

Dans le même temps, alors que le gouvernement yéménite a également renforcé la lutte contre Al-Qaïda, désormais prioritaire depuis l'attentat manqué contre un avion à destination des Etats-Unis, des affrontements violents ont opposé cette semaine manifestants sécessionnistes et forces de l'ordre dans le sud, autrefois indépendant et où la colère contre les nordistes au pouvoir à Sanaa monte.

Des conflits tous azimuts, qui font douter les observateurs de la capacité du gouvernement à faire face. «Il y a de nombreux conflits au Yémen, et ils semblent empirer sans cesse», a noté lundi dernier la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton. «Il y a des attentes et des conditions à la poursuite de notre soutien au gouvernement», a-t-elle mis en garde.

Le gouvernement central de Sanaa, de plus en plus contesté par la population qui lui reproche népotisme et négligence, ne contrôle pas grand-chose, au-delà de la région de la capitale. Dans la plus grande partie du Yémen, ce sont les puissantes tribus qui exercent la réalité du pouvoir, dont certaines ont accordé l'asile à des combattants d'Al-Qaïda.

Aujourd'hui, certains craignent qu'Al-Qaïda ne réussisse à séduire les sécessionnistes du sud. En mai, le chef de la branche locale du mouvement terroriste, Naser Abdel-Karim al-Wahishi, s'était adressé aux sudistes, disant soutenir leur cause contre ôôl'oppression et la tyrannie» exercée par Sanaa.

Les provinces du Sud ont été indépendantes pendant des décennies, dirigées par un régime socialiste. La République populaire démocratique du Yémen s'est réunifiée en 1990 avec le Nord-Yémen, et quatre ans plus tard, Sanaa réprima une nouvelle tentative de sécession à l'issue de trois mois de guerre civile.

Depuis, nombreux au Sud-Yémen accusent les nordistes aux commandes à Sanaa de prendre revenus du pétrole et terres, et d'écarter les sudistes du gouvernement et de l'armée.

Le mouvement sécessionniste a repris de plus belle en 2008 et 2009. Dimanche et mardi, les forces de sécurité dans l'ancienne capitale sudiste Aden ont tenté par deux fois d'investir les locaux d'Al-Ayyam, le journal sudiste le plus influent, fermé l'année dernière car accusé de visées sécessionnistes. L'affrontement avec les gardients du journal a fait trois morts. Et si le rédacteur en chef d'Al-Ayyam, Hisham Bashraheel, et son fils se sont rendus mercredi, ce nouvel épisode a déclenché des manifestations dans d'autres villes du sud.

Pendant ce temps, dans le nord montagneux, la rébellion chiite de la tribu des Hawthis bat son plein. Le soulèvement contre le gouvernement d'Ali Abdullah Saleh a commencé en 2004, mais depuis août dernier, c'est l'escalade, qui a même provoqué l'intervention de l'armée saoudienne. Sanaa et Riyad accusent Téhéran de soutenir ce mouvement rebelle, ce dont doutent nombre d'observateurs occidentaux.

Samedi, l'armée yéménite a affirmé avoir tué des dizaines de rebelles au cours des affrontements de ces derniers jours.

Selon un diplomate occidental, des éléments au sein du gouvernement ont encouragé la présence au nord d'extrémistes sunnites salafistes, qui considèrent les chiites hérétiques et ont radicalisé les positions. Les salafistes gagneraient en influence au sein du gouvernement et de l'armée, poussant le président Saleh à continuer la guerre au nord.