Abdullah Abdullah, qui doit affronter le président afghan sortant Hamid Karzaï, a menacé de boycotter le second tour de la présidentielle le 7 novembre si une série de conditions pouvant garantir un scrutin régulier ne sont pas remplies d'ici à la fin de la journée de samedi.

Cet éventuel boycott ne décrédibiliserait pas l'élection, a estimé la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton.

«Si nous ne recevons pas une réponse positive à nos demandes d'ici la fin de la journée, le Dr. Abdullah annoncera lui-même sa décision» dimanche, a affirmé le porte-parole du candidat, Sayed Aqa Fazel Sancharaki.

Un autre membre de l'équipe de campagne avait auparavant souligné que si les demandes n'étaient pas satisfaites, «nous ne participerons pas à une élection qui ne soit pas transparente et sans fraudes».

Côté Karzaï, on explique que des discussions entre les deux parties, à propos d'un partage du pouvoir Karzaï-Abdullah, ont échoué.

«Il y a eu des demandes énormes du camp Abdullah pour plusieurs ministères, huit postes ministériels, qui n'ont pas été acceptées par Karzaï», affirme une source proche de la présidence, qui n'exclut pas un accord de dernière minute.

Abdullah Abdullah doit s'exprimer dimanche à 9H30 à Kaboul au cours d'une conférence de presse.

Le premier tour avait été entaché de violences, d'une faible participation (38,7%), et surtout de fraudes massives en faveur d'Hamid Karzaï, entraînant l'annulation de près d'un quart des bulletins de vote.

M. Abdullah avait demandé lundi le renvoi du chef de la Commission électorale indépendante (IEC), chargée de l'organisation et du comptage du scrutin et accusée de favoriser M. Karzaï, Azizullah Ludin.

«Si nos conditions ne sont pas entendues (...), ce ne sera pas une élection mais une spirale de fraudes» et «nous ne participerons pas», a confirmé à l'AFP Ahmad Behzad, parlementaire et proche d'Abdullah.

Mais pour Washington, la menace du retrait d'un candidat ne suffit apparemment pas à décrédibiliser le scrutin. «Je ne pense pas que cela ait quoi que ce soit à voir avec la légitimité de l'élection. C'est un choix personnel», a estimé Hillary Clinton.

La principale demande de M. Abdullah, le renvoi du chef de la Commission électorale, avait été refusée par la Commission comme par le président Karzaï.

Supposés être indépendants, les commissaires de l'IEC ont été nommés par M. Karzaï, dont M. Ludin est un ancien conseiller.

Ce dernier a été mis en cause à plusieurs reprises par des observateurs électoraux et des organisations de défense des droits de l'Homme, dont Human Rights Watch (HRW), qui dénonçaient son penchant pro-Karzaï.

Lundi, M. Abdullah avait aussi demandé la suspension de trois ministres qui avaient fait campagne au premier tour pour M. Karzaï, et la suppression des bureaux de vote «fantômes» du premier tour - qui n'avaient pas ouvert mais néanmoins envoyé des urnes pleines.

Plusieurs observateurs avaient estimé que ces «conditions minimales» requises pour un second tour équitable par M. Abdullah avaient si peu de chances d'être remplies qu'elles s'apparentaient à un refus de participer au scrutin.

Un diplomate européen a renchéri samedi: «"Abdullah a très probablement décidé de ne pas se présenter», même si «les négociations se poursuivent, plus que jamais».

«Ce sera annoncé demain. Et si tout va bien, ça aura sans doute fait l'objet d'un accord avec l'équipe Karzaï», croit-il savoir, ajoutant qu'un retrait de M. Abdullah «arrangerait tout le monde».

Après de fortes pressions internationales, M. Karzaï, crédité de 49,67% des suffrages après annulation d'un tiers de ses voix pour fraude, avait accepté de disputer un second tour contre M. Abdullah (30,59% des votes).