Plusieurs pays occidentaux, dont les Etats-Unis, ont réclamé lundi une annonce rapide des résultats définitifs de la présidentielle afghane du 20 août, à l'issue toujours incertaine, après l'invalidation d'une partie des bulletins, jugés frauduleux.

La commission d'enquête sur les fraudes lors de l'élection a ordonné dans la journée l'invalidation d'un «certain pourcentage» de bulletins, renforçant l'hypothèse d'un second tour à moins d'un accord de partage de pouvoir entre le sortant Hamid Karzaï et son principal rival Abdullah Abdullah.

Mais cette Commission des plaintes électorales (ECC) n'a pas précisé quel candidat a perdu combien de voix. Et personne n'était en mesure d'affirmer de manière certaine que M. Karzaï passait sous la barre des 50% ou si l'autre autorité, la Commission Electorale Indépendante (IEC), chargée, elle, de prononcer le résultat officiel, suivra ou non les conclusions de la première.

Deux mois après le scrutin, le flou complet règne donc encore sur l'issue de cette élection controversée, et la communauté internationale cache de moins en moins son impatience devant l'absence de résultats définitifs.

La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a dit lundi avoir «bon espoir» de voir la crise électorale résolue «conformément à l'ordre constitutionnel et dans les prochains jours», et a précisé s'attendre à une déclaration de M. Karzaï mardi. Jugeant que l'évolution actuelle était «encourageante», elle a estimé qu'un éventuel second tour était possible.

Le porte-parole du président Barack Obama, Robert Gibbs, a lui appelé les dirigeants afghans à «faire en sorte que ce processus soit légitime».

Le gouvernement britannique a demandé à l'IEC d'invalider rapidement les votes frauduleux pour permettre la publication des résultats définitifs.

Le Premier ministre canadien Stephen Harper a lui aussi exhorté le président Karzaï à s'engager au maintien du «processus démocratique constitutionnel», lors d'un entretien téléphonique.

Au secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, qui lui faisait la même demande, également par téléphone, M. Karzaï «a affirmé qu'il respecterait pleinement l'ordre constitutionnel», a déclaré la porte-parole de M. Ban, Michèle Montas.

Le principal adversaire de M. Karzaï, l'ancien ministre des Affaires étrangères Abdullah Abdullah, a lui estimé qu'un second tour rétablirait «la foi du peuple dans le processus» électoral.

A Kaboul, l'ECC a annoncé avoir trouvé «des preuves claires et convaincantes de fraudes» dans 210 bureaux de vote (sur 25.450 au total), dont elle ordonne l'invalidation des bulletins.

Elle a donc demandé à l'IEC l'invalidation d'un «certain pourcentage des voix de chaque candidat», sans plus de précisions.

L'Américain Peter Galbraith, ex-chef adjoint de la mission de l'ONU en Afghanistan, démis de ses fonctions après avoir dénoncé les fraudes, a estimé lundi que celles-ci pourraient en réalité être deux fois plus élevée que ce qui a été arrêté par l'ECC.

Selon les calculs d'une organisation américaine d'observateurs électoraux, Democracy International, les invalidations ordonnées vont «réduire le score du président Hamid Karzaï à environ 48,29%», contre 54,6% selon les résultats provisoires, M. Abdullah grimpant lui de 27,8% à 32% des voix.

L'IEC doit ensuite annoncer d'ici quelques jours, peut-être mercredi, les résultats officiels du scrutin en tenant compte, en théorie, de ces invalidations. Elle est constitutionnellement tenue d'obéir aux injonctions de l'ECC, mais peut néanmoins faire des recours, retardant l'annonce du résultat.

Depuis le début du processus, les tensions sont fortes entre l'ECC, parrainée par l'ONU, et l'IEC, considérée comme soutenant le président sortant. La communauté internationale craint depuis des semaines que M. Karzaï n'accepte pas les résultats s'il ne gagne pas au premier tour.