Le président sortant Hamid Karzaï et son principal rival Abdullah Abdullah étaient au coude-à-coude, avec un léger avantage pour le premier, après le dépouillement de 10% des suffrages de la présidentielle afghane, a annoncé mardi la Commission électorale afghane.

D'après ces premiers résultats, M. Karzaï obtiendrait 40,6% des suffrages déclarés valides, contre 38,6% pour son principal rival, l'ancien ministre des Affaires étrangères Abdullah Abdullah. Suivent ensuite le candidat indépendant Ramazan Bashardost, avec 10,2% des votes valides, et l'ancien ministre des Finances Ashraf Ghani avec 2,9%.

Des résultats finaux sont attendus pour la mi-septembre. De nombreux observateurs afghans et internationaux ont signalé des irrégularités à plus ou moins grande échelle lors du scrutin, qui semble en outre avoir souffert d'une forte abstention.

«Selon les informations, la participation tourne autour de 30 à 35%», a assuré un diplomate occidental ayant requis l'anonymat.

Dès le lendemain de la présidentielle jeudi - la seconde de l'histoire tourmentée de l'Afghanistan - le camp de Hamid Karzaï, favori du scrutin, avait annoncé sa victoire dès le premier tour; celui de son principal rival, l'ancien ministre des Affaires étrangères Abdullah Abdullah, assurait être largement en tête au premier.

«Nous avons gagné, sans aucun doute», a réaffirmé mardi Din Mohammad, directeur de campagne de M. Karzaï.

«Je laisse la Commission électorale annoncer les chiffres, mais je peux vous dire (...) qu'il n'y a pas besoin de second tour», a-t-il ajouté.

Le ministre des Finances Omar Zakhaïlwal, un partisan du président, a dit lundi à la presse que M. Karzaï avait rassemblé 68% des suffrages exprimés.

«Je pense que ça tourne plutôt autour de 60%», a tempéré un proche du président afghan ayant requis l'anonymat.

Le président sortant, au pouvoir depuis fin 2001 lorsqu'une coalition internationale mené par les États-Unis avait chassé les talibans, avait remporté la première présidentielle en 2004 avec 55,4% des voix.

Abdullah Abdullah, qui a acquis pendant la campagne une stature nationale, clame depuis plusieurs jours avoir des preuves de fraudes massives en faveur du sortant.

D'après les observateurs, les deux hommes se sont lancés dans une stratégie de tension avant que les résultats officiels n'annoncent soit une victoire de Karzaï ou d'Abdullah, soit la tenue d'un second tour.

Pour un responsable de l'ONU ayant requis l'anonymat, ces déclarations contradictoires «font partie du jeu et, quoi qu'ils disent, les candidats eux-mêmes n'ont qu'une vision partielle» du résultat.

«Personne ne connaît le résultat. Les Afghans eux-mêmes ne savent pas», renchérit un diplomate occidental.

«Abdullah semble se positionner en prévision d'un échec (...): accepter la défaite, féliciter le vainqueur de bon coeur, devenir un opposant honorable», ajoute le membre de l'ONU.

Le diplomate occidental est du même avis: «je ne crois pas qu'Abdullah soit un homme du genre à aller jusqu'à l'affrontement» armé, comme le craignent certains observateurs, mais en cas de défaite, «il pourrait devenir chef de l'opposition».

Le représentant spécial de l'ONU en Afghanistan, Kai Eide, a appelé lundi toutes les parties à faire preuve de «patience» et à respecter «le processus électoral».

Selon le porte-parole de la Commission électorale (IEC), Noor Mohammad Noor, environ 10% des résultats de la présidentielle seront communiqués mardi, ce qui ne permettra pas encore de se faire d'idée claire pour l'avenir.

L'IEC, dont le président Azizullah Lodin est un ancien conseiller de M. Karzaï, est elle-même la cible de nombreuses accusations de partialité en faveur du sortant.

Le risque d'une division entre le nord tadjik (2e ethnie du pays), où Abdullah a sa base électorale, et le sud pachtoune (1ère ethnie), réservoir de voix de Karzaï, est bien réel dans un pays où l'insurrection islamiste ne cesse de prendre de l'ampleur.

Mardi, quatre soldats américains ont encore péri dans l'explosion d'une bombe dans le sud. Ainsi, avec 295 soldats étrangers tués, 2009 devient, dès août, l'année la plus meurtrière pour les forces internationales depuis fin 2001.