Des centaines de policiers anti-émeute étaient déployés samedi sur une place de Téhéran où une manifestation de l'opposition a été interdite, alors que les autorités ont averti qu'elles réprimeraient tout nouveau rassemblement contre la réélection du président Mahmoud Ahmadinejad.

Aucun manifestant n'était présent place Enqelab une heure avant le rassemblement, prévu à 7h30 HAE, selon les témoins que se sont exprimés vers 06h30 HAE.

La circulation était normale et de nombreux policiers étaient aussi déployés aux alentours, selon ces témoins. La presse étrangère n'est pas autorisée à couvrir les manifestations interdites qui se sont multipliées depuis le début de la semaine.

Quelques heures plus tôt, des organisateurs avaient dit renoncer à la marche en raison de son interdiction mais on ignorait s'ils seraient entendus du mouvement de contestation.

Le chef du mouvement de la contestation et candidat à la présidentielle, Mir Hussein Moussavi, devait s'adresser dans l'après-midi au peuple iranien alors que la République islamique vit un moment crucial après une semaine de contestation sans précédent.

L'Association iranienne des religieux combattants, qui voulait organiser une nouvelle grande manifestation au centre de la capitale, a dit qu'«en absence d'autorisation, il n'y a pas de manifestation», selon un communiqué de l'association fondée par l'ex-président réformateur Mohammad Khatami.

Dans une intervention clé, le guide suprême de l'Iran Ali Khamenei a confirmé vendredi la victoire du président ultraconservateur Ahmadinejad, contestée par les perdants qui dénoncent de graves irrégularités. Il a écarté la possibilité de toute fraude massive et exigé la fin de toute manifestation.

Samedi, le ministère de l'Intérieur et la police ont souligné que toute manifestation était interdite dans l'ensemble du pays et averti que les autorités feraient respecter l'interdiction sans faiblesse.

«Aucune autorisation n'a été délivrée pour des rassemblements et des manifestations à travers le pays», a dit le ministère.

La police a de son côté averti que tous les organisateurs de manifestations illégales seraient arrêtés et poursuivis en justice.

«Nous soulignons que la police agira avec détermination contre toute manifestation et protestation illégales,» a déclaré Ahmad Reza Radan, chef adjoint de la police à la télévision d'Etat.

Le chef de la police Ahmadi Moghadam a en particulier averti par lettre M. Moussavi que toute manifestation serait «fermement réprimée», selon l'agence Isna.

Les partisans de M. Moussavi n'ont pas encore dit s'ils manifesteraient ou non. M. Moussavi devait adresser en milieu d'après-midi un «communiqué important au peuple iranien», selon le site internet de son journal Kalemeh, mais celui-ci n'avait toujours pas été publié peu avant l'heure prévue du rassemblement.

Téhéran et d'autres villes sont depuis une semaine le théâtre de grandes manifestations contre la réélection de M. Ahmadinejad dans un scrutin dont M. Moussavi, le principal rival du président, demande l'annulation.

Deux des trois perdants du scrutin du 12 juin, M. Moussavi, un conservateur modéré, et le réformateur Mehdi Karoubi, ont boycotté samedi une réunion prévue avec le Conseil des gardiens, chargé de valider le scrutin et d'examiner leurs plaintes. Seul le conservateur Mohsen Rezaï y a participé, selon une source au Conseil citée par l'agence Ilna.

Le Conseil s'est dit prêt à recompter les voix dans 10% des urnes prises «au hasard» sur l'ensemble du pays, en présence des candidats, selon son porte-parole.

Alors que la presse étrangère a été soumise ces derniers jours à de nombreuses restrictions, le rédacteur en chef du quotidien réformateur iranien Etemad Melli, dirigé par Mehdi Karoubi, a été arrêté samedi à son domicile par des inconnus, a déclaré un de ses proches.

La mise en garde de l'ayatollah Khamenei a provoqué l'inquiétude des Occidentaux qui ont appelé Téhéran à faire preuve de retenue.

À Washington, le président Barack Obama a averti que «le monde observe» le comportement de l'Iran dans la crise.

Les dirigeants de l'Union européenne (UE) ont appelé les autorités iraniennes à garantir «le droit de tous les Iraniens à se rassembler et à s'exprimer pacifiquement» et «à s'abstenir de recourir à la force contre les manifestations pacifiques».