Le président sortant Mahmoud Ahmadinejad a remporté haut la main la présidentielle iranienne d'après les résultats officiels annoncés samedi, provoquant des émeutes en plein coeur de Téhéran de la part des partisans de son principal rival et des accusations de tricherie.

M. Ahmadinejad a qualifié sa réélection au premier tour pour un mandat de quatre ans de «grande victoire», affirmant que le scrutin avait été «totalement libre», alors même que des milliers de partisans de son principal rival, Mir Hossein Moussavi, étaient descendus dans les rues du centre de Téhéran pour protester.

Les affrontements avec la police se sont transformés en scènes d'émeutes dans certains quartiers, selon des témoins et des correspondants de l'AFP. Leur cible était le ministère de l'Intérieur, un grand bâtiment de béton remontant à l'époque du chah.

La capitale n'avait pas connu de telles violences depuis les émeutes estudiantines de juillet 1999.

Aucun incident n'a été signalé en revanche dans les autres grandes villes.

Selon le ministre de l'Intérieur Sadegh Mahsouli, M. Ahmadinejad, 52 ans, a recueilli 24 527 516 voix (62,63%), devant l'ex-premier ministre Moussavi, un conservateur modéré revenu sur le devant de la scène politique après 20 ans d'absence, arrivé deuxième avec 13 216 411 voix (33,75%).

Le conservateur Mohsen Rezaï a recueilli 1,73% des voix et le réformateur Mehdi Karoubi 0,85%. Ce dernier a jugé les résultats «illégitimes» et «inacceptables».

La participation a été de 85%, «un record», selon M. Mahsouli, qui n'a fait état d'aucune irrégularité dans le scrutin.

Mais M. Moussavi a dénoncé «vigoureusement les irrégularités visibles et nombreuses», affirmant que cela ne pouvait que «fragiliser le régime islamique et instaurer le mensonge et la tyrannie».

«Les gens ne sont pas dupes et ne plieront pas face à ceux qui arrivent au pouvoir en trichant», a dit M. Moussavi, avant d'appeler ses partisans au calme.

«Je vous demande fermement de n'agresser aucun individu et groupe, de ne pas perdre votre sang-froid et de vous abstenir de toute action violente», a-t-il lancé.

De son côté, l'Association du clergé combattant, dont l'ancien président réformateur iranien Mohammad Khatami est l'un des fondateurs, a appelé à l'annulation de l'élection et à l'organisation d'un nouveau scrutin, se disant préoccupée par «un trucage massif des voix».

Malgré l'interdiction de la police, les manifestations se poursuivaient tard dans la soirée, tandis que le premier réseau de téléphonie portable, contrôlé par l'État, a été coupé à Téhéran.

Criant «dictature, dictature» ou encore «démission du gouvernement de coup d'État», les manifestants bloquaient plusieurs artères de la capitale, notamment l'avenue Vali-e Asr et des rues avoisinantes.

Des dizaines de personnes ont été arrêtées, menottées et conduites dans un local du ministère de l'Intérieur, a constaté un correspondant de l'AFP.

La campagne électorale s'était déroulée dans un climat tendu entre candidats mais aussi dans une atmosphère festive, à un niveau jamais vu en 30 ans de République islamique. Elle avait aussi reflété des divisions profondes sur l'avenir de l'Iran après quatre ans de mandat Ahmadinejad.

Alors que la réélection de ce dernier devrait compliquer les efforts du président américain Barack Obama pour surmonter 30 ans d'hostilité entre les États-Unis et l'Iran, la secrétaire d'État Hillary Clinton a dit espérer que le résultat du vote reflétait «la véritable volonté et le désir de la population».

En Israël, ennemi juré de l'Iran, le ministre des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, a appelé la communauté internationale à agir «sans concession» contre l'Iran et notamment son programme nucléaire controversé.

En revanche, l'allié régional de l'Iran, le président syrien Bachar al-Assad a félicité Mahmoud Ahmadinejad pour sa victoire, de même que le mouvement islamiste palestinien Hamas.