L'armée pakistanaise poursuivait jeudi son offensive contre les talibans dans la vallée de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, où plus de 670.000 civils ont été déplacés et 200.000 autres sont toujours pris au piège dans le chef-lieu Mingora.  

Au 19e jour de son opération, l'armée a pilonné des repaires présumées de combattants islamistes dans la vallée de Swat, jadis le site le plus touristique du pays dont les talibans avaient pris le contrôle il y a près de deux ans.  «Des caches d'insurgés ont été visées dans les districts de Dir et de Swat et beaucoup de leurs repaires ont été détruits dans les zones montagneuses», a déclaré à l'AFP un responsable des services de sécurité, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat.

Mercredi, le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) avait revu à la hausse --de 500.000 à 670.000-- le nombre de civils ayant fui la zone des combats depuis le 2 mai.

Alors que des milliers de civils terrorisés sont bloqués au milieu des affrontements armés, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a indiqué qu'il avait pu accéder pour la première fois au département de Buner, l'un des plus touchés par les combats entre forces gouvernementales et talibans.

«Nous sommes allés à Buner aussi vite que nous avons pu», a déclaré le  coordinateur médical du CICR pour le Pakistan, Bart Janssens.

 «Il n'y a plus ni électricité ni eau potable. La plupart des magasins sont fermés, les denrées sur le marché sont rares et les rues semblent désertes», a-t-il indiqué.

Jeudi, des habitants de Mingora, le chef-lieu du département de Swat où des talibans sont retranchés, ont supplié le gouvernement de leur venir en aide. «Les gens deviennent fous, les enfants et les femmes pleurent, s'il vous plaît, dites au gouvernement de nous sortir de là», a témoigné un commerçant.

Cette vallée de Swat n'est qu'à une centaine de kilomètres d'Islamabad, la capitale de l'unique puissance atomique militaire du monde musulman, meurtrie depuis juillet 2007 par le terrorisme islamiste et menacée de déstabilisation.

Le président pakistanais, Asif Ali Zardari, en visite aux Etats-Unis pour des discussions avec son homologue américain Barack Obama, avait appelé mardi soir la communauté internationale à se mobiliser pour venir en aide aux civils et éviter une catastrophe humanitaire.

De passage mercredi à Londres, Il a souligné que le combat contre les talibans était «une entreprise à long terme».

L'armée a lancé le 26 avril une vaste offensive dans les départements de Lower Dir et Buner, avant d'étendre son opération dans celui, voisin, de Swat, aux mains des talibans liés à Al-Qaïda depuis l'été 2007.

A la mi-février, Islamabad avait signé un accord de paix en vertu duquel les talibans acceptaient un cessez-le-feu en échange de l'instauration, à Swat et six autres départements, de tribunaux islamiques.

Mais, loin de déposer les armes, les combattants islamistes avaient profité du cessez-le-feu pour pousser leur avantage sur le terrain, en s'emparant des départements du Lower Dir et de Buner.

Islamabad, allié clé des Etats-Unis dans leur «guerre contre le terrorisme» depuis les attentats du 11-Septembre, était sous forte pression de Washington qui avait qualifié l'accord de Swat d'«abdication» face aux islamistes.

Outre plus de 2.000 soldats pakistanais tombés depuis fin 2001 dans les zones tribales face aux talibans locaux, afghans et Al-Qaïda, le Pakistan est le théâtre d'une vague sans précédent d'attentats suicide qui a tué plus de 1.800 personnes en un an et demi. Oussama ben Laden en personne a déclaré le jihad, la «guerre sainte», à Islamabad pour son soutien à Washington.