A deux jours des élections provinciales, l'Irak a annoncé jeudi la fin du contrat de la société de sécurité américaine Blackwater, symbole de l'entrée des sociétés privées dans les guerres au XXIe siècle, visée par la justice pour une fusillade ayant tué des Irakiens en 2007.

«Le contrat est terminé. Il ne sera pas renouvelé sur ordre du ministre de l'Intérieur (...) à cause de l'incident de la fusillade en 2007», a indiqué le général Abdel Karim Khalaf, porte-parole du ministère irakien de l'Intérieur.

«Blackwater a essayé par tous les moyens de contourner notre décision, mais nous avons dit: Non!», a souligné M. Khalaf.

«Blackwater a procédé aux démarches adéquates pour obtenir sa licence en Irak. Nous n'avons reçu aucune communication officielle de la part du gouvernement irakien ou de notre client (le gouvernement américain) concernant l'avancée de ces démarches ou l'avenir de nos activités en Irak», a affirmé une porte-parole de la société, Ann Tyrrell, dans un courriel à l'AFP.

Cette annonce intervient deux jours avant des élections provinciales cruciales dans lesquelles le Premier ministre Nouri al-Maliki, dont la liste est donnée favorite, s'est fortement impliqué.

Après la mort en septembre 2007 d'Irakiens dans une fusillade à Bagdad impliquant Blackwater, M. Maliki avait réclamé sans succès le départ de la société.

«Nous avons été informés» de la décision irakienne et «travaillons avec le gouvernement irakien et avec nos prestataires pour gérer les implications de cette décision», a indiqué pour sa part à l'AFP un responsable de l'ambassade des Etats-Unis à Bagdad.

Blackwater est la plus grande entreprise privée de sécurité utilisée par les Etats-Unis en Irak. Ses agents assurent notamment la protection du personnel de l'ambassade américaine à Bagdad.

Le 16 septembre 2007, une fusillade était survenue à un carrefour de l'ouest de Bagdad, au passage d'un convoi diplomatique américain escorté par des employés de Blackwater.

Cinq d'entre eux sont accusés par la justice américaine d'avoir tiré sur des civils irakiens désarmés, tuant 14 personnes selon l'enquête américaine, 17 personnes selon l'enquête irakienne.

Les cinq agents ont plaidé non-coupable des 35 chefs d'accusation dont ils doivent répondre. Leur procès s'ouvrira le 29 janvier 2010.

S'ils sont reconnus coupables, ils encourent jusqu'à dix ans de prison pour chaque homicide et 30 ans de prison pour infraction à la réglementation des armes.

Un sixième employé de Blackwater a plaidé coupable de tentative d'homicide en décembre.

L'incident avait indigné l'Irak, où le gouvernement a déclaré qu'il se réservait le droit de poursuivre également les six hommes.

«Je me sens mieux. C'est une revanche pour toutes les familles des victimes. Ce sont des criminels et nous ne voulons pas de criminels dans notre pays», a déclaré Afrah Abbas, dont la mère est morte dans la fusillade.

Depuis le 1er janvier, conformément à l'accord de sécurité signé entre les Etats-Unis et Bagdad, les salariés des sociétés de sécurité étrangères peuvent être poursuivis par la justice irakienne.

Ces sociétés emploient près de 100.000 personnes (agents, cuisiniers, chauffeurs, etc) en Irak, où sont stationnés 142.000 soldats américains.