Un jeune journaliste afghan accusé de blasphème contre l'islam et condamné à mort en janvier a vu sa peine réduite en appel mardi à 20 ans de prison par un tribunal de Kaboul.

Sayed Perwiz Kambakhsh, 23 ans, avait été condamné le 22 janvier à la peine capitale par le tribunal de Mazar-i-Sharif, dans la province de Balkh (nord), en l'absence d'avocat et sans lui laisser le temps de se défendre.

Cette condamnation avait suscité un tollé dans le monde et de nombreux appels avaient été lancés à l'adresse du président Hamid Karzaï pour qu'il annule cette décision.

«La cour d'appel revient sur la condamnation à mort prononcée en première instance par le tribunal de Balkh et condamne à l'unanimité Perwiz Kambakhsh à 20 ans de prison pour avoir insulté l'islam et le prophète Mohammad», a déclaré mardi le président du tribunal, Abdul Salam Qazaizada.

«Je n'accepte pas cette décision», a clamé Perwiz Kambakhsh, qui a déjà passé près d'un an en prison, avant d'être emmené par des policiers hors du tribunal.

«Cette condamnation est injuste et nous allons bien sûr poursuivre la procédure. J'en appelle au président Karzaï pour mettre fin à la corruption du système judiciaire qui viole les droits des citoyens», a affirmé son avocat, Mohammad Afzal Shormach Nuristani.

La défense peut maintenant en appeler à la Cour suprême, qui va examiner la procédure et le jugement.

Plusieurs témoins de l'accusation ont été entendus mardi, avant l'énoncé du verdict. Cinq anciens professeurs de Perwiz Kambakhsh à l'université de Mazar-i-Sharif ont expliqué que celui-ci posait fréquemment des questions «insultantes envers l'Islam».

«Il perturbait le bon fonctionnement des cours avec des questions brutales et hostiles envers l'islam», a assuré l'un d'eux, Mohammad Yaseen.

«Pourquoi l'islam est-il une religion si dure», aurait-il demandé à un autre enseignant.

L'avocat du jeune homme a répondu que ces témoignages n'avaient rien à voir avec l'acte d'accusation, l'impression et la diffusion d'articles sur l'islam récupérés sur internet.

Un camarade de classe de Perwiz Kambakhsh, Hamid, est aussi revenu mardi sur le témoignage à charge qu'il avait apporté lors du premier procès, expliquant qu'il avait agi sous la contrainte des services de sécurité.

Sayed Perwiz Kambakhsh avait plaidé non coupable à l'ouverture de son procès en appel le 18 mai, niant avoir blasphémé et affirmant: «Je suis musulman et je ne me permettrais jamais d'insulter ma religion».

«J'ai été forcé de signer les documents d'accusation. J'ai été torturé (par les forces de sécurité), je n'avais pas d'autre choix que d'accepter les accusations», avait-il ajouté.

Le journaliste, membre de la minorité chiite, était employé par une publication locale, Jahan-e Naw (Nouveau Monde), tout en poursuivant des études universitaires.

Kambakhsh avait été arrêté le 27 octobre 2007 pour avoir distribué à ses camarades de l'université de Mazar-i-Sharif un article «insultant pour l'islam et interprétant de manière erronée des versets du Coran», selon l'acte de condamnation.

Il avait imprimé des articles sur une interprétation de l'islam, en particulier sur la condition des femmes, récupérés sur un blog iranien.

La constitution afghane adoptée après la chute des talibans fin 2001 repose sur la loi islamique (charia), qui requiert la peine de mort pour des actes jugés contraires à l'islam.