Le policier irakien Ali Abdoul Hussein devait fêter jeudi la fin du ramadan avec ses collègues et amis. Mais à midi, devant une mosquée du sud de Bagdad, il pleurait leur mort dans un attentat suicide qu'il a tenté en vain d'empêcher. 

Hussein, 33 ans, était en faction devant la mosquée Al-Rasoul, dans le quartier de Jadida, lorsqu'un kamikaze portant une veste d'explosifs s'est précipité sur le barrage de police filtrant l'entrée de l'édifice.

«J'ai vu un homme courir vers le barrage juste devant la mosquée», raconte le policier à l'AFP. «J'ai tout de suite remarqué sa ceinture et j'ai crié pour prévenir mes collègues».

«J'ai couru vers le kamikaze mais deux policiers lui avaient fait barrage».

Le candidat à la mort a alors déclenché les explosifs, déchiquetant les deux policiers et projetant Hussein au sol.

Légèrement blessé au genou, Hussein est de retour sur les lieux de l'attaque après avoir conduit ses collègues à l'hôpital.

«J'ai dû enlever mon uniforme qui était couvert de sang», explique-t-il. «Sans l'intervention de mes amis, il y aurait eu un massacre dans la mosquée».

Des centaines de fidèles étaient alors présents pour la prière du matin, en ce premier jour de célébration de l'Aïd al-Fitr, qui marque la fin du mois de jeûne du ramadan, par la majorité des chiites irakiens.

Douze personnes ont été tuées, et trente autres blessées dans l'attaque, selon un bilan établi par les services de sécurité irakiens.

A peu près au même moment, dans le quartier voisin de Zafaraniyah, un kamikaze a précipité sa voiture piégée sur un barrage gardant l'entrée d'une autre mosquée chiite, tuant huit personnes.

Devant la mosquée Al-Rasoul de Jadida, sandales de plastique et chaussures souillées baignant dans des mares rouges de sang témoignent du massacre de la matinée.

Le responsable de la sécurité de la mosquée, Mohammed Borhan, 29 ans, désigne du doigt un caniveau à quelques mètres de là, où ont été regroupés les restes du kamikaze, enlevés peu après dans un sac poubelle.

Attroupés autour d'un des leurs, policiers et militaires se repassent en boucle une vidéo capturée sur un téléphone portable: la tête décapitée du suicidé, appuyée sur une demi jambe amputée, à côté d'une main droite et d'un tas immonde d'abats informes et sanguinolents.

La bouche et les yeux encore entrouverts, l'adolescent fixe le ciel d'un regard vaporeux, l'expression d'un léger étonnement saisie par la mort. Bricolé avec du scotch noir, un détonateur artisanal repose sur sa joue brûlée par l'explosion.

«La vidéo aidera à l'identification plus tard», explique Borhan. «Mais comment peut-on vouloir faire ça contre cette mosquée?», s'interroge-t-il, remarquant que l'assaillant était inconnu dans le quartier.

Quelques policiers ont repris leur mission de surveillance et fouillent un à un les fidèles pénétrant toujours par dizaines dans la mosquée.

Mohammed Borhan les regarde et soupire: «Jusqu'à aujourd'hui, le ramadan avait été plus calme que les années précédentes à Bagdad. Mais maintenant pour nous, l'Aïd est terminé avant même d'avoir commencé».