Un raid américain mené dans la nuit de jeudi à vendredi contre un village de l'ancien bastion de Saddam Hussein a fait huit morts civils selon des sources locales, mais sept selon l'armée américaine qui dit avoir visé et tué «un terroriste d'Al-Qaeda».

Le bombardement a eu lieu à Al-Dour, à 180 km au nord de Bagdad, connu pour être le village où s'était réfugié l'ancien dictateur irakien avant d'y être capturé le 13 décembre 2003 par l'armée américaine.

«Vers 2h00 vendredi (19h00 HAE jeudi), la maison a été encerclée par les forces américains puis, peu de temps après, bombardée par des hélicoptères américains», a déclaré à l'AFP Abdel Karim Khalil Ibrahim, témoin et cousin de la famille visée par le raid, qui habite à 50 mètres de là.

«Huit personnes de la même famille, cinq hommes et trois femmes, ont été tuées par le bombardement», a de son côté ajouté le lieutenant Firas al-Douri, de la police d'Al-Dour, en précisant qu'un enfant a également été blessé.

Sur place, plusieurs témoins et policiers ont raconté les mêmes faits.

À l'hôpital de Tikrit, le docteur Imad Al-Joubouri a confirmé à l'AFP avoir reçu huit corps dont les blessures sont «comparables à celles que l'on observe habituellement chez les victimes de bombardements aériens».

Vendredi matin, la bâtisse de 250 mètres carrés, située près du Tigre, était entièrement détruite, tout comme trois véhicules garés à côté, et ses débris étaient éparpillés tout autour, a constaté sur place un correspondant de l'AFP.

Selon des témoins, les Américains ne s'étaient pas rendus sur place pour visiter la maison ou interroger ses occupants, avant le raid.

L'armée américaine a confirmé en début d'après-midi avoir mené dans la nuit un raid contre cette maison, décrite comme celle d'un «membre présumé» d'Al-Qaeda, et tué sept personnes, dont l'homme visé par l'opération.

Dans un communiqué où elle fait assaut d'une prudence assez inhabituelle, l'armée américaine a indiqué avoir ciblé et tué l'un des occupants de la maison, un «présumé terroriste et membre d'Al-Qaeda», «soupçonné de participer à la préparation d'attaques et de se vanter du sort de ses victimes».

Selon elle, les forces de la coalition, informées de la présence du «terroriste présumé», «ont encerclé le bâtiment et ordonné à ses occupants de se rendre», ce qu'ils n'ont pas fait bien qu'avertis «pendant une heure».

«Un homme armé», qui s'avèrera être le «terroriste présumé», «est alors apparu à la porte», et les forces de la coalition, «ressentant une intention hostile», ont ouvert le feu sur lui et l'ont tué, selon l'armée.

Par la suite, l'aviation américaine est intervenue en soutien et a ouvert le feu, tuant trois autres «personnes soupçonnées d'être des terroristes» et «trois femmes», et blessant «une enfant».

L'armée indique par ailleurs avoir arrêté un «suspect» qui s'était enfui du bâtiment bombardé.

Elle affirme enfin que l'homme visé par l'attaque était «soupçonné» de fournir des bombes artisanales à un réseau terroriste opérant dans la région de Mouqdadiyah, «où plus de 25 bombes ont fait 38 victimes depuis le 1er août».

Bastion de Saddam Hussein et de sa tribu, la région de Tikrit, en très grande majorité sunnite, est l'un des foyers de l'insurrection anti-américaine qui a toutefois perdu de sa vigueur au cours de la dernière année.

Dans l'après-midi, plusieurs centaines de personnes, venues de cinq mosquées différentes après la prière du vendredi, ont manifesté contre ce bombardement dans les rues d'Al-Dour, en dénonçant notamment «l'Amérique, ennemie de Dieu».