Le pape François a refusé de commenter les accusations d'un prélat qui affirme qu'il a couvert un cardinal américain soupçonné d'abus sexuels, et recommandé de recourir à la psychiatrie pour aider des enfants aux penchants homosexuels, après une visite en Irlande dominée par les abus de pédophilie dans le clergé.

«Je ne dirai pas un mot là-dessus. Je pense que le communiqué parle de lui-même», a déclaré le souverain pontife aux journalistes dans l'avion qui le ramenait dimanche à Rome. «Lisez attentivement le communiqué et faites-vous votre propre jugement», leur a-t-il conseillé.

Le pape François a été mis en cause par un ex-ambassadeur du Vatican à Washington, l'archevêque Carlo Maria Vigano, qui l'accuse dans une lettre ouverte d'avoir annulé des sanctions contre le cardinal américain Theodore McCarrick, en faisant fi de signalements de son «comportement gravement immoral avec des séminaristes et des prêtres».

«La corruption a atteint le sommet de la hiérarchie de l'Église», affirme dans sa lettre Mgr Vigano, en allant jusqu'à demander la démission du pape.

Cette lettre, confirmée par son auteur, a été publiée samedi dans plusieurs publications catholiques américaines de tendance traditionaliste ou ultraconservatrice ainsi que dans un quotidien italien de droite.

L'ancien nonce apostolique aujourd'hui à la retraite y met aussi en cause nommément nombre de hauts prélats de la Curie romaine.

«Le Vatican n'a aucun commentaire immédiat», a déclaré une porte-parole du Saint-Siège interrogée sur les accusations de Mgr Vigano.

Le cardinal McCarrick, 88 ans, a été accusé fin juillet d'abus sexuels et interdit d'exercer son ministère, un scandale qui a ébranlé la hiérarchie de l'Église catholique américaine. Le pape a aussi accepté sa démission de son poste de cardinal, un fait quasi inédit dans l'histoire de l'Église.

L'homme a été accusé d'abus par un adolescent, des faits remontant à des décennies, mais qui n'étaient pas connus publiquement.

Psychiatrie

Interrogé par ailleurs dans l'avion sur ce qu'il dirait à des parents constatant des penchants homosexuels dès l'enfance chez leur progéniture, le pape a évoqué un recours à la psychiatrie.

«Quand cela se manifeste dès l'enfance, il y a beaucoup de choses à faire par la psychiatrie, pour voir comment sont les choses. C'est autre chose quand cela se manifeste après vingt ans», a-t-il déclaré.

«Je ne dirai jamais que le silence est un remède. Ignorer son fils ou sa fille qui a des tendances homosexuelles est un défaut de paternité ou de maternité», a-t-il ajouté.

La visite de deux jours du pape François en Irlande a été très focalisée sur les abus commis au sein de l'Église, que ce soit des abus sexuels ou les filles-mères auxquelles on a retiré les enfants pour les faire adopter.

L'Église catholique est dans la tourmente avec des accusations mettant en cause des actes pédophiles commis en toute impunité par des membres de son clergé pendant des décennies, de l'Irlande aux États-Unis en passant par le Chili, et des appels des victimes à agir pour que les responsables soient sanctionnés.

Lors d'une messe géante à Dublin dimanche, le pape a égrené une longue liste de «pardons» aux victimes d'abus commis par le clergé ou des institutions religieuses en Irlande, et notamment aux «enfants qui furent éloignés de leurs mères» parce qu'elles avaient été enceintes hors mariage.

Le souverain pontife a aussi pointé du doigt «des membres de la hiérarchie de l'Église» qui ont «gardé le silence».

Depuis 2002, plus de 14 500 personnes se sont déclarées victimes d'abus sexuels commis par des prêtres en Irlande, et la hiérarchie de l'Église irlandaise est accusée d'avoir couvert les agissements de centaines de prêtres.

L'ampleur de ces scandales explique en partie la perte d'influence de l'Église sur la société irlandaise ces dernières années.