Le pape François n'a pas jugé nécessaire dimanche de commenter de graves accusations portées contre lui dans un texte, selon lesquelles il aurait couvert durant son pontificat les agissements du cardinal américain Theodore McCarrick, accusé publiquement en juillet de sévices sexuels.

« Je ne dirai pas un mot là-dessus. Je pense que le communiqué parle de lui-même », a déclaré le souverain pontife, interrogé dans l'avion qui le ramenait à Rome après un voyage en Irlande.

Un ex-ambassadeur auprès du Vatican à Washington, l'archevêque Carlo Maria Vigano, a accusé dans une lettre ouverte publiée en fin de semaine le pape François d'avoir annulé des sanctions contre le cardinal McCarrick et d'avoir passé sous silence des descriptions internes sur son comportement homosexuel prédateur sur de jeunes séminaristes et prêtres.

« J'ai lu ce matin ce communiqué », a déclaré le pape aux journalistes qui l'accompagnaient dans l'avion, en faisant référence à cette lettre. « Lisez attentivement le communiqué et faites-vous votre propre jugement », a-t-il dit.

« Vous avez la capacité journalistique suffisante pour tirer des conclusions. C'est un acte de confiance. Si le temps passe un peu et que vous tirez des conclusions, peut-être que je parlerai, mais j'aimerais que votre maturité professionnelle fasse ce travail. Cela vous fera vraiment du bien », a-t-il conseillé aux journalistes, qui avaient largement fait état de l'information dimanche.

« La corruption a atteint le sommet de la hiérarchie de l'Église », affirme Mgr Vigano dans sa lettre ouverte, en allant jusqu'à demander la démission du pape François.

Son texte de onze pages a été publié simultanément samedi dans plusieurs publications catholiques américaines de tendance traditionaliste ou ultraconservatrice, ainsi que dans un quotidien italien de droite.

Il a été rendu public au second jour du court voyage du pape François en Irlande, où la question des sévices sexuels de l'Église dans le monde a occupé particulièrement le terrain médiatique.

Mgr Vigano, 77 ans, qui fut nonce à Washington entre 2011 et 2016, affirme que Benoît XVI avait imposé des sanctions canoniques au cardinal McCarrick vers la fin des années 2009-2010. Le prélat devait quitter le séminaire où il vivait, éviter tout contact public et vivre une vie de pénitence.

Cette mise à l'écart de la vie publique avait été décidée plusieurs années après des rapports de deux anciens ambassadeurs du Vatican à Washington, aujourd'hui décédés.

Alors qu'il était devenu à son tour ambassadeur à Washington, Mgr Vigano dit avoir écrit en 2006 un premier mémo sur McCarrick à son supérieur à Rome, suggérant même qu'il subisse « un traitement médical ».

L'archevêque Vigano raconte avoir été interrogé par le nouveau pape François peu après sa prise de fonction, en juin 2013, sur la personnalité de McCarrick.

Selon lui, le pape argentin aurait préféré ignorer ses avertissements et avait annulé de fait les sanctions de son prédécesseur, prenant le prélat américain comme conseiller sur des nominations de cardinaux.

Dans sa lettre au vitriol, l'ancien nonce apostolique aujourd'hui à la retraite met également en cause nommément un grand nombre de hauts prélats de la Curie romaine et des cardinaux américains, accusés d'un silence complice sur les sévices de Theodore McCarrick.

Le pape François a finalement accepté en juillet la démission du collège des cardinaux de Theodore McCarrick, 88 ans, archevêque émérite de Washington, accusé de sévices sur un adolescent, faits remontant à plusieurs décennies.

Le vieil homme devra rester reclus dans une maison pour mener une vie de prière et de repentance.