Le Parlement turc a adopté mercredi une nouvelle loi « antiterroriste » controversée qui reprend plusieurs mesures de l'état d'urgence mis en place après le putsch manqué de juillet 2016 et levé la semaine dernière, a rapporté l'agence de presse étatique Anadolu.

Le parti au pouvoir (AKP, islamoconservateur), qui a présenté ce texte au Parlement, a défendu le texte comme nécessaire afin d'éviter un « ralentissement » dans la lutte contre les « groupes terroristes » après la levée de l'état d'urgence.

Mais, ses détracteurs accusent le gouvernement de vouloir pérenniser l'état d'urgence avec cette loi qui renforce considérablement les pouvoirs des autorités.

Le texte, consulté par l'AFP, contient plusieurs mesures qui semblent en effet inspirées de l'état d'urgence, comme la possibilité pour les autorités de continuer de limoger les fonctionnaires liés à des « groupes terroristes » pendant encore trois ans.

En outre, les administrateurs publics nommés pendant l'état d'urgence à la tête d'entreprises soupçonnées de liens avec une « organisation terroriste » pourront rester en place pendant encore trois ans.

Autres mesures : les manifestations et rassemblements seront, sauf autorisation spéciale, interdits après le coucher du soleil. Les autorités locales pourront restreindre l'accès à certaines zones, et la garde à vue pourra dans certains cas durer jusqu'à 12 jours.

L'adoption de cette loi survient une semaine après la levée de l'état d'urgence qui avait été instauré quelques jours après la tentative de coup d'État du 15 au 16 juillet 2016.

Ankara impute la tentative de putsch au prédicateur Fethullah Gülen, qui réside depuis une vingtaine d'années aux États-Unis et dément toute implication.

Dans le cadre de cet état d'urgence, les autorités turques ont mené pendant deux ans une traque implacable contre les putschistes et leurs sympathisants présumés, mais ont aussi visé des opposants prokurdes accusés de « terrorisme », des médias critiques et des ONG.

Depuis le coup de force, près de 80 000 personnes soupçonnées de liens avec le putsch ou avec le « terrorisme » ont été incarcérées, et plus de 150 000 fonctionnaires ont été limogés ou suspendus.

Peu avant le vote des députés mercredi, le ministère de l'Intérieur avait levé la révocation des passeports de plus de 155 000 personnes, qui avaient été privées de leur document de voyage sous l'état d'urgence au motif qu'elles étaient mariées à un « suspect ».