Figure de la vie politique française et européenne, Simone Veil est entrée dimanche avec son époux Antoine au Panthéon, où elle reposera parmi « les héros » qui ont fait « la France plus grande et plus forte », selon le président Emmanuel Macron.

Une intense émotion a marqué la cérémonie d'hommage qui a rassemblé des milliers de personnes dans le centre de Paris un an après le décès, le 30 juin 2017 à 89 ans, de l'une des personnalités préférées des Français.

Cette rescapée de la Shoah a perdu ses parents et son frère en déportation. Simone Veil avait été déportée au camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau à 16 ans par le convoi n° 71 du 13 avril 1944, parmi 1500 juifs.

Son entrée au Panthéon a été la décision de « tous les Français », a déclaré M. Macron sur le parvis du monument où reposent les « grands hommes » de l'Histoire de France.

« Nous avons voulu que Simone Veil entre au Panthéon sans attendre le passage des générations pour que ses combats, sa dignité, son espérance restent une boussole dans les temps troublés que nous traversons », a-t-il ajouté.

Simone Veil « portait sur le bras gauche le stigmate de son malheur, ce numéro 78 651 de déportée à Birkenau. Il sera gravé sur son sarcophage », a souligné Emmanuel Macron. Avec elle, « c'est la mémoire des 78 500 juifs et tziganes déportés de France qui entre et vivra en ces lieux ».

Massés sur les trottoirs sous un soleil implacable, de nombreux anonymes essuyaient des larmes. « Pour moi, Simone Veil est le symbole de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Elle incarne la devise républicaine », a résumé Sylvie, une enseignante de 50 ans.

Les Français sont invités à lui rendre hommage sous la coupole du Panthéon jusqu'à ce que les deux cercueils soient portés lundi dans le sixième caveau de la crypte.

Le couple Veil reposera aux côtés de Jean Moulin, André Malraux, René Cassin et Jean Monnet, « quatre grands personnages de notre Histoire » qui « furent comme elle des maîtres d'espérance », selon Emmanuel Macron.

« Combattante de l'Europe »

Dans son discours, M. Macron est revenu sur la vie de combat de Simone Veil : la réconciliation après la Seconde Guerre mondiale, la lutte pour les droits des femmes - elle fit adopter en 1975 comme ministre de la Santé la loi sur l'interruption volontaire de grossesse - et l'engagement pour l'Europe avec la présidence en 1979 du premier Parlement européen élu au suffrage universel.

« Elle qui avait vécu l'indicible expérience de la sauvagerie et de l'arbitraire savait que seuls le dialogue et la concorde entre les peuples empêcheraient qu'Auschwitz ne renaisse sur les cendres froides de ses victimes. Elle se fit combattante de l'Europe », a déclaré Emmanuel Macron.

« Nous devons à Simone Veil de ne pas laisser les doutes et les crises qui frappent l'Europe atténuer la victoire éclatante que depuis 70 ans nous avons remportée sur les déchirements et les errances des siècles passés », a-t-il ajouté.

Présents parmi les invités, l'ex-président François Hollande a estimé que l'entrée au Panthéon était « le meilleur message qu'on pouvait donner » à l'heure où l'Europe se déchire, notamment sur l'accueil des migrants. Son prédécesseur Nicolas Sarkozy a appelé à retenir les leçons de Simone Veil, qui est pour lui « l'héroïne du XXe siècle ».

Justice aux femmes

Pour Emmanuel Macron, l'entrée au Panthéon de Simone Veil permet de rendre justice aux femmes qui n'étaient jusqu'à présent que quatre à y être inhumées.

« Avec Simone Veil entrent ici ces générations de femmes qui ont fait la France sans que la nation leur offre la reconnaissance et la liberté qui leur étaient dues », a-t-il déclaré.

La cérémonie a été rythmée par la musique et les chants, comme « l'Ode à la joie » de Ludwig Van Beethoven, devenu l'hymne européen. L'émotion a été palpable lorsque les jeunes choristes de la Maîtrise de l'Opéra Comique ont chanté a capella « Nuit et brouillard », la chanson de Jean Ferrat consacrée aux victimes des camps de concentration.

Un autre moment poignant a été la minute de silence avec la diffusion du « bruit du silence du camp » de Birkenau-Auschwitz.

PHOTO CHRISTOPE LUDOVIC MARIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Simone Veil reposera à l'Élysée au côté de son époux Antoine.

PHOTO BORIS HORVAT, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Simone Veil en 2011