Si la Russie réagissait à toutes les « fake news » la concernant, ses diplomates passeraient leurs journées à démentir, affirme la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova.

Régulièrement accusée en Occident de diffuser de fausses informations et de relayer des rumeurs sans fondement à des fins de déstabilisation, notamment via des médias publics comme RT et Sputnik, la Russie contre-attaque activement ces derniers temps, et accuse à son tour les Occidentaux de désinformation.

« Cela ne date pas d'aujourd'hui, cela a toujours été comme ça », mais les « fake news » « se manifestent au maximum » quand la Russie « fait quelque chose de positif à l'échelle internationale, en organisant des évènements d'ampleur comme la Coupe du monde de soccer, les Jeux olympiques ou des sommets internationaux », assure à l'AFP Mme Zakharova.

« Avant, nous laissions beaucoup de choses sans réponse. Maintenant, nous répondons point par point », souligne cette diplomate qui a créé une rubrique spéciale sur le site du ministère russe des Affaires étrangères pour y publier les « exemples de " fake news " les plus odieux » concernant la Russie, accompagnés de démentis détaillés.

Cette rubrique comporte pour le moment une soixantaine d'articles, épinglant le Times de Londres, le New York Times, le quotidien français Le Monde et même le journal russe Kommersant.

« La Russie va-t-elle s'ingérer dans les élections en Italie? Peut-être qu'elle n'en aura pas besoin », est le titre d'un article publié en mars par le New York Times présenté sur le site de la diplomatie russe avec la mention « C'est une fake news !».

Campagne médiatique

« Accusée d'ingérence dans la présidentielle américaine de 2016, la Russie a toujours démenti. " Nous soulignons toujours que nous respecterons le choix légitime des électeurs dans n'importe quel pays, y compris en Italie " », précise le démenti.

« Si nous réagissions à chaque publication de ce genre, il nous faudrait publier des centaines de milliers de démentis du matin au soir », assure Maria Zakharova.

Cette contre-attaque de Moscou connaît parfois des faux pas : jeudi, lors de son briefing à la presse, Mme Zakharova a accusé l'AFP d'avoir utilisé une photo recadrée venant des réseaux sociaux et destinée à porter atteinte à l'image de la Russie. La porte-parole a repris ainsi des accusations fausses lancées par la presse russe, l'AFP n'ayant jamais utilisé cette photo dont l'original vient en outre d'une autre agence internationale.

Après l'empoisonnement de l'ex-agent secret russe Sergueï Skripal et de sa fille le 4 mars en Angleterre, imputé par les autorités britanniques à la Russie, Moscou qui nie toute implication dans cette affaire, a dénoncé « la mise en place par Londres d'une campagne médiatique pour accuser la Russie sans aucune preuve ».

Les critiques ont visé en particulier le Times de Londres, accusé de diffuser de fausses informations, pour « induire en erreur » la société.

« Erreur purement technique »

En avril, la Russie et l'Occident se sont mutuellement accusés de diffuser de « fausses informations » sur l'attaque chimique présumée dans la ville syrienne de Douma, qui a déclenché des frappes de Washington, Paris et Londres contre des installations du régime syrien.

Moscou a dénoncé une « mise en scène » de Washington destinée à « fournir un prétexte » à une action militaire contre Damas. Pour sa part, la diplomatie française a accusé la Russie de multiplier « les déclarations officielles contradictoires sur l'attaque chimique de Douma » afin de « semer le doute et la confusion ».

« C'est beaucoup plus commode de dire que la Russie diffuse de fausses informations que de croire que l'attaque chimique en Syrie a vraiment été mise en scène », a assuré à l'AFP la rédactrice en chef de RT, Margarita Simonian.

Jeudi, les autorités françaises ont donné un avertissement à la branche française de RT pour « manquements à l'honnêteté, à la rigueur de l'information et à la diversité des points de vue » dans un sujet concernant cette affaire.

Dans ce sujet, « contestant la réalité des attaques à l'arme chimique dans la Ghouta orientale », le Conseil supérieur de l'audiovisuel a notamment observé « que la traduction orale des propos tenus par un témoin syrien ne correspondait en rien à ce qu'il exprimait à l'antenne », ce témoin évoquant en dialecte syrien la situation de famine sévissant dans la zone, alors que la traduction française évoquait une simulation d'attaque chimique.

La responsable en France de RT a plaidé « une erreur purement technique qui a été corrigée ».

RT est dans le collimateur des autorités françaises depuis que le président Emmanuel Macron l'a accusée en mai 2017 de s'être comportée, avec le média public russe Sputnik, en « organes d'influence [...] et de propagande mensongère » pendant la campagne présidentielle française.

Pour Mme Simonian, ces accusations sont « non seulement sans fondement, mais elles sont tout simplement fausses ».