Les pompiers russes étaient en accusation jeudi, visés par des plaintes de proches de victimes d'un incendie meurtrier d'un centre commercial en Sibérie, qui les accusent de ne pas avoir agi assez rapidement le jour du drame.

Les services de secours ont pour leur part affirmé avoir fait tout leur possible pour venir à bout de l'incendie, qui a fait 64 morts, dont 41 enfants, dimanche à Kemerovo, soulignant la responsabilité de l'administration et des agents de sécurité du centre commercial.

Au moins trois personnes ont saisi le parquet de la région de Kemerovo pour mettre en cause «l'inaction des secours et des membres des forces de l'ordre lors de l'opération de sauvetage», a indiqué un porte-parole du parquet régional à l'agence publique TASS.

«Le Parquet a reçu les plaintes et est en train de les examiner. Les proches des victimes vont être interrogés pour établir la chronologie des événements», a confirmé à l'AFP un militant de Kemerovo, Maxime Outchvatov.

Selon la plainte, dont des extraits ont été publiés par le journal RBK, l'une des plaignantes, Nadejda Vostrikova, qui a perdu cinq de ses proches dans l'incendie, raconte avoir reçu le jour du drame un appel téléphonique de sa fille lui disant qu'elle était prise au piège dans une des salles du cinéma situé au dernier étage du centre commercial, qui était fermé à clé.

Lorsqu'elle se rend sur les lieux, Nadejda Vostrikova voit quatre pompiers inactifs.

«Je me suis mise à genoux et je leur ai demandé: "les gars, sauvez mes enfants". Ils m'ont répondu avec indifférence: "On ne peut pas vous aider, on attend la brigade des secouristes"», indique-t-elle dans sa plainte, selon RBK.

Une autre plainte citée par le journal rapporte un dialogue similaire entre un proche de victimes et des pompiers qui déclarent ne pas avoir le «matériel approprié» pour pouvoir entrer en toute sécurité dans le cinéma.

D'autres pompiers seraient ensuite «lentement» arrivés sur les lieux, trop tard pour sauver les victimes prises au piège, qui ne répondaient déjà plus au téléphone, selon la plainte.

«Mépris de la vie humaine»

«Je considère le travail des pompiers lors de la première heure comme de l'inaction et du mépris de la vie humaine», affirme Nadejda Vostrikova.

«Il reste encore des questions sur la manière dont l'incendie a été éteint. D'après ce que je sais, ils ont commencé à éteindre les flammes sur le toit après une heure et demie et les pompiers sont arrivés près du bâtiment après 40 minutes», affirme dans des images diffusées à la télévision un autre proche de victimes, Igor Vostrikov.

«Quelqu'un a pris la décision de fermer la porte (de la salle de cinéma) et d'attendre les secours. Mais comme on le sait, les secours ne sont pas arrivés», a-t-il encore déclaré.

Le ministère russe des Situations d'urgence a de son côté assuré que les pompiers étaient arrivés sur les lieux moins de cinq minutes après avoir été prévenus et qu'ils avaient immédiatement commencé les évacuations» et entrepris d'éteindre l'incendie à son épicentre, au troisième étage.

«Il y avait déjà une épaisse fumée, il était presque impossible de s'orienter. On ne voyait rien à un mètre, la température était très élevée et le feu se propageait rapidement», a expliqué un responsable local des pompiers, Andreï Boursine, cité dans un communiqué.

«Ni l'administration ni la sécurité (du centre) n'était présente au moment de l'arrivée des pompiers ou en tout cas, personne n'est venu à leur rencontre. Personne n'a pu dire s'il y avait encore des gens à l'intérieur et combien», a-t-il poursuivi.

Il a confirmé qu'aucun des systèmes de protection anti-incendie du bâtiment n'avait fonctionné et que «toutes les issues de secours étaient fermées».

Quatre jours après ce drame, la colère n'est pas retombée en Russie, de nombreuses personnes étant choquées des nombreuses «violations flagrantes» constatées par les enquêteurs, qui ont abouti à ce que des enfants se retrouvent bloqués dans des salles fermées à clé, tandis que le système d'alarme incendie était en panne.

Certains manifestent ouvertement cette colère sur les réseaux sociaux ou dans la rue, tandis que l'opposition dénonce la corruption qui a, selon elle, permis à ce drame de se produire.

Le Comité d'enquête a indiqué mercredi que les investigations sur les circonstances de l'incendie de Kemerovo pourraient durer près de trois mois. Cinq personnes, parmi lesquelles des responsables du centre commercial et un membre de la sécurité, ont déjà été placées en détention provisoire.