Aux Pays-Bas, un nom d'oiseau lancé à l'encontre du roi peut valoir jusqu'à cinq ans de prison et 20 000 euros d'amende, d'après une loi « moyennâgeuse » qui n'a plus sa place dans le monde d'aujourd'hui, ont affirmé des députés néerlandais.

La chambre basse du Parlement débattait jeudi soir de la suppression de la loi sur le crime de lèse-majesté, un thème qui provoque des tensions au sein de la fragile majorité gouvernementale.

La question avait soigneusement été évitée lors des laborieuses négociations pour former une coalition aux Pays-Bas, un des rares pays à avoir maintenu un tel crime dans leur législation.

La loi, qui remonte à 1830, est « une restriction de la liberté d'expression », ont souligné les députés progressistes, emmené par Kees Verhoeven, à l'origine d'un projet de loi de modification rédigé début 2016.

« Cette loi n'est plus de ce temps. Insulter le roi ou insulter son voisin: la législation ne devrait plus faire de différence », a ajouté le socialiste Ronald van Raak, soulignant que la liberté d'expression devait l'emporter sur « la susceptibilité du roi ».

La proposition de loi des progressistes, qui, selon les conservateurs, trouvent toujours « le moyen de s'attaquer à la royauté de temps en temps », vise à supprimer les dispositions contre la diffamation royale et à placer le roi au même niveau que le citoyen lambda.

Rarement appliquée, la loi sur le crime de lèse-majesté a été utilisée pour la dernière fois en juillet 2016, lorsqu'un Néerlandais de 44 ans a été condamné à trente jours de prison pour avoir qualifié sur Facebook le roi Willem-Alexander de meurtrier, violeur et voleur...

En cas d'adoption de la proposition de loi, les membres de la famille royale pourraient toujours être protégés contre la diffamation en portant plainte comme n'importe quel citoyen, a souligné M. van Raak.

« Il est inconcevable de voir le roi se rendre à vélo à la gendarmerie pour porter plainte », a rétorqué le député de l'Appel chrétien-démocrate (CDA) Chris van Dam.

La proposition de loi crée des tensions au sein de la coalition gouvernementale du premier ministre libéral Mark Rutte, entre D66 - connu pour ses positions progressistes sur l'euthanasie et l'avortement notamment -, et les deux partis conservateurs chrétiens.

« Nous devons protéger notre maison royale qui reste un symbole fort dans notre société et garde une grande fonction dans la gouvernance de ce pays », a souligné Gert-Jan Segers, leader de l'Union chrétienne.

En dépit de ces oppositions, une majorité en faveur de la suppression du crime de lèse-majesté se dessine parmi les députés.